Être ministre et ne plus l’être du jour au lendemain ressemble au cycle de vie. Jubilé à la naissance et pleurer à la mort. C’est ce qui arrive actuellement aux ministres qui n’ont plus retrouvé leurs portefeuilles dans le nouveau gouvernement Klassou II.
A priori, ils ont un sentiment de la honte, étant conscients que des milliers de leurs détracteurs se réjouissent de leur nouvelle situation de togolais lambda, qui viennent de rejoindre le rang de la majorité.
Vis-à-vis de leurs anciens collègues, c’est le sentiment de la gêne, celui qui donne l’impression de n’avoir pas été compétent ou d’avoir failli dans l’exercice de leurs fonctions.
A la maison c’est mitigé. Un complexe hybride de colère et de sérénité forcée qui ne dure que le temps des discussions sur le sujet. Quelques minutes après, femmes, enfants, cousins et domestiques n’ont pas droit à l’erreur. Ils sont systématiquement remis à leurs places. La maison devient calme.
La télévision retrouve un ami intime qui l’a ignoré pendant les années qu’ont duré la fonction de ministre. Curieusement, les chaines suivies ne sont pas celles du pays. Car on supporte difficilement de voir sa place et ses privilèges animées par un successeur.
Le tout nouveau ancien ministre zappe les chaînes à chaque seconde, sans jamais prêter attention aux images. Et si par mégarde il tombe sur une chaîne nationale qui expose un nouveau ministre, jurons, rires aux éclats, s’intercalent dans un coup de whisky plutôt rare et cher qu’on sort spécialement ce jour pour masquer le complexe du changement de cap qui tire vers la déchéance….
Un ministre qui vient de quitter le gouvernement est disponible. Assis au salon dépenaillé et débraillé dans son fauteuil souvent en un habit léger.
Au téléphone, il parle fort, pour ne pas trahir son chagrin et remercie son interlocuteur avec beaucoup de respect et des litanies de Dieu.
L’ennui gagne du terrain, mais attention aux nouveaux ministres de narguer un ministre débarqué en tentant de l’appeler. Ils sont proprement insultés après le coup de fil.
Donc avis à tous les malins qui tentent de savoir ce que devient un ministre qui vient de quitter le gouvernement.
Vous n’êtes pas les bienvenus si ce que vous avez à dire n’est pas de critiquer ceux qui sont au gouvernement.
Penchez plutôt vos discussions vers des termes d’éloges, de destin et surtout de Dieu. Vous auriez la chance d’être même invités à partager un pot avec M. Le ministre, comme on les appelle même s’ils ont perdu leur poste.
Pour ceux qui ont des ministres débarqués du gouvernement dans leur entourage, observez bien leurs attitudes. Vous retrouverez sûrement ces signes qui s’illustrent physiquement par deux grosses rides sur le fronton. C’est le signe d’une désolation masquée. Mais, il n’ y a pas de règle sans exception. Certains ministres échappent à ce sort, surtout s’ils savent qu’ils peuvent se faire valoir encore mieux ici ou ailleurs.
Carlos KETOHOU