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SYRIE: A Alep, jihadistes et rebelles régissent la vie des habitants

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« C’est comme si on avait un vrai Etat »: à la sortie du tribunal, Mohamed montre fièrement l’acte de propriété de son magasin. Il porte le sceau de la cour islamique qui régit désormais la vie des quartiers rebelles de la ville d’Alep, la métropole du nord de la Syrie.

« Maintenant, nos droits sont garantis, tout est officiel », poursuit-il, évoquant les nouvelles institutions mises en place par la rébellion à la faveur d’une relative accalmie dans les combats qui ensanglantent depuis neuf mois la capitale économique de la Syrie en guerre.

Mariage, héritage, contrats commerciaux, tout passe maintenant par cette autorité judiciaire gérée par des juges et des avocats passés à la rébellion et placée sous le patronage du Front islamique.

La cour islamique régit désormais la vie des quartiers rebelles.

Sous cette bannière sont regroupées les plus importantes forces rebelles d’Alep, avec à leur tête les jihadistes du Front Al-Nosra (une branche d’Al-Qaïda en Irak) et les salafistes d’Ahrar al-Cham, ainsi que Liwa al-Tawhid, une importante brigade soutenue par la Coalition de l’opposition en exil.

Si les chefs de ces formations assurent s’en tenir au volet militaire, leur mainmise se fait pourtant sentir bien au-delà des lignes de front.

Liwa al-Tawhid, par exemple, a mis en place des écoles ainsi qu’une « autorité de l’électricité » pour tenter de réalimenter des dizaines de quartiers privés depuis des mois de courant.

« L’idée, explique un commandant rebelle sous le couvert de l’anonymat, c’est qu’il n’y ait pas un jour de vacance quand le régime va tomber, l’administration et les institutions doivent être opérationnelles dès maintenant ».

Par ailleurs, alors que monte la grogne des civils, qui dénoncent des pillages commis par des rebelles, Liwa al-Tawhid a mis en place une police militaire, en charge de faire appliquer la loi aux combattants.

Une « bonne idée », selon Oum Ahmed, qui affirme que sa première préoccupation désormais ce sont « les hommes armés qui se réclament de l’Armée libre (rebelles) qui viennent nous voler nos biens ». « Parfois même juste après un bombardement, on les voit se ruer sur les décombres », dit-elle.

C’est justement à cause de ces vols de plus en plus fréquents qu’Abdallah, 28 ans, se présente ce matin au tribunal islamique.

« Je veux déménager et donc je fais enregistrer tous mes biens à mon nom, comme ça on ne pourra pas m’accuser de les avoir volés », dit-il.

Mais face à ces rebelles sans foi ni loi, les civils comme les combattants préfèrent faire appel à Al-Nosra, qui fait figure de modèle d’intégrité. « Quand on veut arrêter un rebelle, on se tourne vers eux car ce sont les seuls qui ont la force suffisante », explique un combattant.

Le Front a d’ailleurs été appelé à plusieurs reprises pour mettre fin à des affrontements entre brigades rebelles à Alep, notamment lors de litiges pour la distribution de munitions ou du butin de pillages, selon plusieurs habitants.

Mais le Front Al-Nosra et les salafistes de Ahrar al-Cham, loués pour les importantes victoires qu’ils ont remportées et appréciés des civils pour leur travail humanitaire, suscitent aussi des questionnements car leur radicalisme religieux fait peur à certains.

« Le problème avec nos frères d’Al-Nosra, c’est qu’ils veulent du jour au lendemain voiler nos femmes comme en Afghanistan », juge le chef d’une brigade rebelle d’origine kurde. « Nous n’avons jamais vécu comme cela, on ne peut pas nous imposer la charia comme ça d’un coup ».

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