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Prochain gouvernement: quelle équipe pour gérer la crise ?

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Les consultations en vue de la formation d’un nouveau gouvernement ont commencé. Un gouvernement de crise bien sûr, étant donné les circonstances dans lesquelles il verra  le jour. Samedi dernier, le chef de l’Etat s’est entretenu avec des délégations de certains partis politiques notamment le Comité d’action pour le renouveau (CAR),  la Convention démocratique des peuples africains (CDPA) et la Convergence patriotique panafricaine (CPP). Les discussions, selon un communiqué de la présidence de la République, ont essentiellement porté sur les sujets qui sont au cœur de la vie de la nation en l’occurrence, la formation d’un nouveau gouvernement et les moyens d’assurer un processus consensuel et apaisé pour les prochaines élections législatives et locales. Certainement que d’autres formations politiques entreront dans la danse des consultations dans le courant de la semaine. Les discussions entamées, la question primordiale qui se pose est celle de savoir la configuration que doit avoir la nouvelle équipe gouvernementale. Autrement dit, quel doit être le profil des personnes habilitées à la former ? Sur quels départements ministériels doit on le plus mettre l’accent ? Voilà autant d’équations à résoudre.

L’expérience a montré que les gouvernements de crise formés sous d’autres cieux ont été des gouvernements « exceptionnels », des gouvernements de compétence et très souvent composées de technocrates, de personnes aptes à apporter leur savoir-faire et toute la capacité qu’ils ont pour la résolution des crises auxquelles leur pays est confronté. Dans la plupart des cas, la durée de vie de ces gouvernements est d’à peine quelques mois. Juste le temps de calmer les esprits et de trouver des solutions définitives aux problèmes qui se posent. On a connu de ces cas à maintes reprises dans les démocraties occidentales comme la France ou la Grande-Bretagne où certaines situations peuvent obliger le pouvoir soit à opérer quelques remaniements au sein de l’équipe gouvernementale, soit à changer complètement son visage.

C’est justement dans le second cas de figure que se retrouve le Togo. Car, même si certaines personnes ne veulent pas le reconnaître ou feignent de l’ignorer, la démission du gouvernement Houngbo est la conséquence d’une crise que connaît le pays de Faure Gnassingbé depuis un certain temps. Une crise liée à l’entêtement du gouvernement, à son refus d’opérer les réformes constitutionnelles et institutionnelles devant baliser la voie à un nouveau départ et surtout à sa volonté d’aller vers les prochaines élections législatives sans, au préalable, prendre en compte un certain nombre de préoccupations dont la résolution permettra d’organiser un scrutin transparent tel que l’exige les partis de l’opposition.

Ceci étant, la logique voudrait donc que la prochaine équipe gouvernementale soit une équipe en mesure de relever les défis auxquels le Togo est confronté, surtout sur le plan politique. Le premier et le plus grand  de ces défis est l’organisation d’élections législatives et locales transparentes et apaisées dans les mois à venir. D’où la nécessité de former un gouvernement apte, performant, compétent, dont les membres seront en mesure de mener à bien la mission qui leur sera confiée. Pour y parvenir, le choix des personnes devant le composer doit forcément obéir à un certain nombre de critères.

Eviter surtout  un gouvernement de complaisance

Un gouvernement de crise n’est pas un gouvernement d’union nationale. Le gouvernement de crise se forme à la suite d’une situation de crise. Il se compose dans le but de trouver une solution donnée à un problème ponctuel. Il est la plupart du temps restreint et ne dure pas longtemps.

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Même si le gouvernement d’Union nationale peut lui aussi être formé à la suite d’une crise, il se différencie du gouvernement de crise par le fait qu’il a pour principal objectif de rassembler les protagonistes d’un problème au sein d’une même équipe. Equipe qui se charge de conduire la destinée du pays jusqu’aux élections prochaines. Dans ce cas, le gouvernement est formé de manière à satisfaire toutes les tendances politiques. C’est ce qui s’est passé en 2007 au Kenya. A la suite de la grave crise qu’a connue ce pays après l’élection présidentielle contestée par l’opposition et ayant engendré plus d’un millier de perte en vies humaines, le candidat de l’opposition, Raïla Odinga, a été nommé Premier ministre par le président contesté Moï Kibaki. Un gouvernement d’union a été formé et dirige le pays jusqu’à ce jour. La République Démocratique du Congo s’est encore mieux illustrée dans ce cas de figure il y a quelques années en formant un gouvernement d’union avec un président et plusieurs vice-présidents ainsi que des dizaines de ministres. L’objectif était de permettre à toutes les tendances de conduire la destinée du pays.

En 2010, à la suite de l’accord intervenu entre le Rassemblement du Peuple Togolais et l’Union des Forces de Changement, des ministres UFC ont intégré le gouvernement. Mais au lieu de travailler pour véritablement apporter quelque chose à leur pays, ils ont beaucoup plus brillé par leur incompétence. Plus de deux ans après, c’est à peine que ces derniers peuvent donner un bilan plus ou moins satisfaisant du travail accompli au sein de cette équipe. Les raisons sont toutes simples : ils n’avaient pas la trempe nécessaire pour diriger les départements qui leur ont été attribués. Il ne s’agit plus de cela maintenant. Le gouvernement qui sera formé dans les jours à venir sera un gouvernement de crise, et donc un gouvernement appelé à résoudre un problème donné. En somme, un gouvernement à qui sera confiée une mission bien déterminée, celle d’organiser les législatives et locales à venir et si possible d’opérer les réformes institutionnelles et constitutionnelles restantes. Pour accomplir une telle mission, il faut mettre la personne qu’il faut à la place qu’il faut. Il va falloir donc éviter les manœuvres tendant à satisfaire à tout prix telle ou telle tendance ou tel ou tel ami politique, des manœuvres visant à insérer coûte que coûte un proche alors que celui-ci ne dispose pas des capacités pouvant lui permettre d’accomplir la mission qui lui sera confiée.

Eviter surtout et surtout les provocateurs

Ceci n’est un secret pour personne. Dans les gouvernements précédents, certains ministres n’étaient pas des exemples à suivre. Très peu courtois envers l’opposition, ils insultaient, manquaient de respect et n’avaient aucun égard pour leurs adversaires politiques qu’ils s’amusaient à traiter de tous les noms d’oiseau. Egoïsme, orgueil et vantardise sont ce qui les caractérisaient le mieux. L’ancien ministre en charge de la Coopération, Gilbert Bawara, est celui qui s’est le plus illustré dans ces genres d’attitude. Il n’hésitait pas, il y a encore quelques années, à traiter Gilchrist Olympio de bandit, de trafiquant ou d’amnésique. D’aucuns croyaient que sa mise à l’écart allait lui permettre de changer. Mais, peine perdue, puisqu’il a encore récidivé il y a un mois au cours de l’une de ses rares sorties médiatiques en traitant les manifestants du « Collectif Sauvons le Togo » de « badauds ». A-t-on encore besoin de pareilles personnes dans la future équipe gouvernementale ? Sûrement pas. D’autant plus que ce gouvernement va se former dans un contexte de crise. Cela exige donc du chef de l’Etat qu’il fasse appel à des personnes réellement en mesure de lui trouver des solutions et non de verser de l’huile sur le feu.

Prioriser certains ministères clés

Promotion de la Femme, solidarité nationale, art et culture (pour ne citer que ceux-là), ce n’est pas ce dont le futur gouvernement a besoin. La priorité doit être accordée dans cette nouvelle équipe à certains ministères clés dont l’apport sera déterminant non seulement pour organiser des élections législatives transparentes, mais aussi pour opérer les réformes constitutionnelles et institutionnelles. Le ministère de l’Administration territoriale y fait partie. Il constitue la cheville ouvrière dans l’organisation des élections au Togo étant donné que c’est par son biais que s’effectue certaines opérations. Autrement, il joue le rôle du ministère de l’Intérieur et a donc besoin d’être piloté par une personnalité de carrure, qui ne joue le rôle ni du pouvoir, ni de l’opposition. Seul une telle personne sera à même de veiller à la réelle transparence du scrutin.

Un autre ministère non moins important est celui de la Sécurité. Vu que c’est ce département qui se charge de la sécurisation du scrutin. Le ministre en charge de ce département dans le gouvernement Houngbo, il faut le reconnaître, a failli à sa mission. Puisque la répression des manifestations n’a jamais été aussi fréquente. De plus, il ne semble pas être à la hauteur de la gestion des manifestations. Des étudiants du campus aux marches hebdomadaires du FRAC en débouchant sur les manifestations du CST, c’est le désordre total. Pire, il ne pouvait savoir d’où venaient les ordres de répressions et qui les donnait. Celui là n’est pas un ministre.  Pour la bonne marche du scrutin à venir, le gouvernement peut prouver sa bonne foi en confiant ce ministère à une personne en mesure de mieux canaliser la colère de la rue.

A ces deux départements, s’ajoutent celui en charge de la Justice. Une justice qui reste toujours inféodée au pouvoir en place, qui obéit à ses ordres plutôt que de dire le droit. Ceci, malgré les milliards dépensés en vue de sa modernisation. Ce département a lui aussi besoin d’un nouveau patron capable de faire en sorte que certaines pratiques n’aient plus cours en son sein. Plus besoin d’un Tchalim Tchitchao trop soumis au chef de l’Etat.

Dans ce lot, il ne faut surtout pas perdre de vue le ministère de la communication. Son patron, Djimon Oré, a consacré beaucoup plus de temps à l’ouverture et à la clôture des séminaires durant ces deux années. Il ne maîtrise rien en communication, il est resté nul sur toute la ligne. Pourquoi ne pas trouver à ce ministère une personnalité capable d’être à la hauteur de la tâche.

Le ministère des Droits de l’Homme ne devrait pas être négligeable dans cette nouvelle équipe. Il est très important que le responsable de ce département maîtrise la question des droits de l’homme et puisse canaliser les ardeurs et les préoccupations des défenseurs. La dame qui est restée à ce poste n’a fait que distraire l’opinion. Pire elle a ennuyé les partenaires dans les occasions où elle est appelée à discuter avec eux.

Le Gouvernement de crise ne signifie pas nécessairement la négligence de certains secteurs clés de la vie de la nation. Il faut une économie luisante et des finances rigoureuses. Les élections ont besoin de décaissement de fonds et sont aussi l’occasion de toutes les dérives financières.  Le secteur des fiances a besoin de rigueur, de transparence et de vision pour les élections.

Le ministère des affaires étrangères est très stratégique en période électorale. Il constitue la vitrine du pays et l’image qui puisse rassurer les partenaires. Jusqu’à la démission de Gilbert Houngbo, ce ministère était dirigé dans la plus grande comédie, dans la plus grande incompétence. Certains diplomates nous ont confié avoir peur du Ministre à son apparition. Cela est banal mais joue beaucoup dans les relations diplomatiques. Il faut un locataire plus professionnel, plus avisé et moins « agressif » à ce poste.

La personnalité du prochain Premier Ministre devra refléter l’image du Gouvernement.  Beaucoup de tempérance, beaucoup de sens de négociation, beaucoup plus libre de ses actions, et il saura juguler la crise.

Voilà autant de conditions que doivent poser ceux qui ont accepté ou ceux qui accepteront de discuter avec le chef de l’Etat en vue de la formation du futur gouvernement. Car, l’essentiel n’est pas de participer à un gouvernement, pour la forme. Il faut avant tout exiger un certain nombre de choses devant permettre d’organiser réellement les élections dans la transparence.

Rodolph TOMEGAH

 

 

 

 

 

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