INTERVIEW EXCLUSIVE: Me Yawovi AGBOYIBO « …s’accorder sur l’article 59 de la constitution et garantir l’alternance en 2015… »
Ainsi que nous l’avions annoncé, depuis son séjour de Paris, l’opposant et ancien Premier Ministre togolais, Me Yawovi Agboyibo est préoccupé par l’alternance politique au Togo en 2015. Sa vision est sans équivoque, fructifier comme dans les années 90, la pression populaire en l’accompagnant d’un dialogue pragmatique pour conduire le Togo à l’alternance en 2015. Ce qui passera sans doute par un consensus autour de la question de limitation de mandat. Voici les réponses du Président d’honneur du Comité d’Action pour le Renouveau CAR.
Me Yawovi AGBOYIBO, vous êtes actuellement à Paris et vous suivez sans doute de près l’actualité au Togo. Dans une récente interview sur RFI, le Premier Ministre togolais, Arthème Ahoumey Zunu s’est prononcé sur la question de la limitation du mandat présidentiel. Il a déclaré qu’aux termes de l’accord politique intervenu le 13 septembre entre les acteurs politiques, le mandat présidentiel a été limité à une durée de 5 ans renouvelables une seule fois. Il a précisé que Faure Gnasingbé pourrait encore se présenter en 2015.
Quelle lecture faites-vous de la question de limitation de mandat présidentiel au Togo ?
Ma lecture de la question de limitation de mandat présidentiel au Togo est sans équivoque.
Il convient de noter qu’à la différence de ce qui s’est passé dans certains pays comme le Sénégal ou le mandat présidentiel a été porté dans sa dernière version de 5 à 7 ans, la durée initiale du mandat présidentiel au Togo n’a pas subi de modification lors de la révision constitutionnelle de 2002. Elle est demeurée fixée à 5 ans et a été reprise comme telle par l’accord du 13 Septembre 2012. De sorte que le premier mandat effectué par le Chef de l’Etat de 2005 à 2010 est acquis.
Ce qui a été modifié par la révision constitutionnelle de 2002, c’est le nombre de renouvellements du mandat présidentiel de 5ans. Ce nombre fixé à une seule fois par l’article 59 de la constitution de 1992 a été déclaré illimité par l’amendement de 2002. C’est cette modification que l’accord politique du 13 septembre 2012 a abrogé en rétablissant le nombre de renouvellement à un.
Le mandat renouvelé en 2010 étant une situation en cours, il doit être également pris en compte pour l’application de l’article 59 de la constitution si l’abrogation vient à être adoptée avant son expiration en 2015.
Il revient aux acteurs politiques de s’accorder sur la manière de libeller et de mettre en œuvre l’article 59 nouveau de la constitution pour garantir l’alternance en 2015
Aujourd’hui, la situation politique est très compliquée avec la réticence de l’opposition d’aller au dialogue alors que c’est dans le cadre d’un dialogue qu’on pourra obtenir un consensus sur les conditions d’élections démocratiques et transparentes. Quel regard portez-vous sur la question du dialogue politique au Togo ?
Si le processus démocratique au Togo a connu des avancées significatives au début des années 90 c’est parce que durant cette période l’opposition a su coupler judicieusement le dialogue avec les pressions populaires. Les choses ont pris une autre allure à partir du moment où l’opposition a eu en son sein des divergences sur le rôle à assigner au dialogue dans la gestion des pressions populaires. Le processus a depuis lors piétiné.
Pour sortir de l’impasse politique actuelle, les différentes composantes de l’opposition doivent s’entendre sur les contours du dialogue susceptible de fructifier la mobilisation populaire et de conduire le pays à l’alternance.
Je vous remercie.
Interview réalisée à Paris par Carlos KETOHOU