Le président par intérim du Venezuela, Nicolas Maduro, a été déclaré vainqueur, d’une très courte tête, à l’élection de dimanche pour succéder à Hugo Chavez, une victoire contestée par l’opposition qui exige un nouveau décompte de l’ensemble des bulletins de vote.
Le résultat très serré du scrutin a plongé dans un climat de tension et d’incertitude ce riche pays pétrolier de 29 millions d’habitants, profondément divisé après 14 ans de « révolution socialiste ».
Malgré l’aura de son défunt mentor, M. Maduro n’a remporté qu’avec 50,66% des suffrages, soit moins de 300.000 voix, son duel face au candidat de l’opposition Henrique Capriles, crédité de 49,07%, le meilleur score jamais réalisé depuis l’ère chaviste, selon un décompte annoncé par le Conseil national électoral (CNE).
« Aujourd’hui, nous pouvons dire que nous avons une victoire électorale juste, légale, constitutionnelle », s’est félicité le président déclaré, 50 ans, devant une foule de partisans réunis au palais présidentiel de Miraflores. « C’est une autre victoire, un hommage à notre +comandante+ Hugo Chavez », a poursuivi le président élu, vêtu d’un blouson aux couleurs du drapeau national, qui avait été adoubé par le dirigeant charismatique de la gauche, emporté par un cancer le 5 mars dernier.
Toutefois, le candidat de l’opposition, qui conteste l’impartialité de l’arbitre électoral et n’a cessé de dénoncer des « abus » durant le scrutin, a averti qu’il refusait d’admettre sa défaite. « Nous n’allons pas reconnaître un résultat avant que chaque bulletin de vote des Vénézuéliens ne soit recompté, un par un », a déclaré M. Capriles, gouverneur de l’Etat de Miranda (nord), entouré de ses sympathisants.
« Le perdant, aujourd’hui, c’est vous et je vous le dis fermement », a-t-il lancé à l’adresse de son adversaire, dont le score relativement faible constitue une importante surprise. « La lutte n’est pas terminée », a souligné cet avocat de 40 ans, qui a opéré une spectaculaire progression après avoir été battu par M. Chavez de 11 points lors de la présidentielle d’octobre. « Nous allons insister pour que la vérité soit connue ».
Auparavant, la présidente du CNE, Tibisay Lucena, avait annoncé, après une attente tendue de plusieurs heures, la victoire de M. Maduro, affirmant que la tendance était irréversible. Un des membres de l’organisme a toutefois réclamé la vérification de l’ensemble des bulletins, une demande appuyée par M. Maduro.
La présidente argentine de gauche Cristina Kirchner a été le premier chef d’Etat à féliciter publiquement son homologue vénézuélien pour sa courte victoire.
Dans les rues de Caracas, au milieu de concerts de pétards, les chavistes ont fêté la victoire. Près d’un kiosque rouge diffusant les messages officiels, Elizabeth Martinez, une ouvrière de 48 ans, jubile. « Je suis en train de fêter la victoire de Maduro et l’amour que je porte à Chavez, un président auquel je serai toujours fidèle », a lancé cette femme affublée d’une moustache postiche, le signe de ralliement des maduristes.
Ancien chauffeur de bus et dirigeant syndical à l’imposante carrure, M. Maduro s’est affiché tout au long de la campagne en garant des « missions bolivariennes », les programmes sociaux, financés par la manne pétrolière du pays doté des plus grandes réserves de brut au monde.
En 14 ans, la part de la population touchée par la pauvreté a reculé de manière spectaculaire passant de 50 à 29%, selon l’ONU. Des bidonvilles sur les hauteurs de Caracas aux gratte-ciel de la capitale, les fidèles chavistes, réveillés au son du clairon, s’étaient pressés dès l’aube dans les bureaux de vote, afin de défendre cet héritage.
La tâche s’annonce loin d’être facile pour M. Maduro, qui a aussi repris le flambeau « anti-impérialiste » en assurant avoir de « nouvelles preuves » de l' »interventionnisme des Etats-Unis » au Venezuela.
Outre une lourde succession, après le vide laissé par l’ancien homme fort du Venezuela, son dauphin, qui doit être investi vendredi prochain pour un mandat de six ans, hérite d’une économie fragile avec une industrie pétrolière à moderniser, une dette égale à la moitié du PIB et une inflation supérieure à 20%, un record en Amérique latine.
Offensif lors de la campagne électorale, M. Capriles, avait insisté sur les difficultés quotidiennes du pays: insécurité record avec 16.000 homicides pour 29 millions d’habitants l’an dernier, coupures de courant et pénuries alimentaires récurrentes.
Adepte de l’économie de marché, il s’était aussi engagé à mettre fin aux « cadeaux » offerts à Cuba et autres alliés du régime, bénéficiaires de plus de 100.000 barils de brut quotidiens, une « pétro-diplomatie » autour de laquelle le Venezuela a bâti son influence régionale.
AFP