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Brève célébration, pas d’engouement particulier, la tension politique est électrique, l’atmosphère sociale est morose, les couleurs de la célébration de la fête nationale au Togo sont ternes. Ce n’est pas nouveau. L’Indépendance au Togo n’a jamais connu une célébration digne de ce nom sauf dans les deux premières années contrairement aux autres pays ou la liesse populaire ébranle les populations dans diverses localités. Ceci fait dire simplement aux observateurs de la scène togolaise que le 27 avril au Togo semble frappé d’une malchance. Cette année au moins que les esprits devraient s’accorder pour offrir à cette journée ses lettres de créances, la pandémie sanitaire vient encore une fois tout remettre en cause.
Lundi a été un jour férié, ordinaire. Pas de cachet particulier. Il faut suivre la télévision nationale au journal de 20 heures dimanche dernier pour voir la timide solennité. Le Chef de l’Etat Faure Gnassingbé a allumé la flamme de l’indépendance avec un groupe sélectionné d’invités. Le COVID-19 oblige, la distanciation s’est imposée. Ils étaient éparpillés devant le monument de l’Indépendance à suivre la prestation de Faure Gnassingbé, en quelques minutes. Après il est rentré dans sa voiture pour se réfugier dans ses conforts, évitant comme tout citoyen du monde actuel de se faire approcher pour choper le coronavirus.
Lundi à la nouvelle présidence, même scénario, même décor clairsemé. Ministres, bureau de l’assemblée nationale, responsables d’institutions de la République étaient les seuls à avoir été conviés à cette cérémonie de célébration symbolique de la fête de l’indépendance.
Cette année donc, le Togo totalise 60 ans de sa souveraineté internationale. 60 ans de célébration devraient faire l’objet d’un cachet particulier. 60 ans dans la vie d’une nation méritent d’être célébrés de façon grandiose.
COVID-19 a choisi encore ce moment pour empêcher la célébration. Un facteur exogène d’une journée qui a toujours souffert au Togo de par les dissensions qui l’animent.
C’est Sylvanus Olympio qui est le père de l’Indépendance du Togo. C’est lui qui a lutté contre les colons pour obtenir au Togo la souveraineté internationale. C’est lui qui a hissé le drapeau togolais devant un peuple en liesse et une communauté internationale en refondation.
C’est le premier président de la république du Togo dont le destin a été écourté par Gnassingbé Eyadéma. C’est dans ses manœuvres le 13 janvier 1963 que le tout premier président de la République a été assassiné. Quatre ans plus tard, il prendra le pouvoir pour régner d’une main de fer pendant 38 ans. C’est en 2005 que dame nature a décidé de l’arracher pour permettre au Togo de tourner la page d’une dictature nuisible pour les citoyens et le développement.
Pour consacrer la victoire de l’assassinat qui était brandi comme un exploit, Gnassingbé Eyadéma a fait du 13 janvier une fête nationale. Fête de « libération nationale » a-t-on clamé.
Pendant 38 ans, le peuple togolais a eu droit à cette célébration en bombance qui tenait lieu et place pour la fête de l’indépendance.
Le 27 avril qui a consacré la vraie libération du Togo a été mis sous éteignoir. Timidement célébré, parfois sans cachet particulier.
Même après la mort du général Eyadema, le Togo a eu du mal à se débarrasser de cette célébration budgétivore qui était la fête de tous les fantasmes et de toutes les provocations.
En 2006, après la signature de l’accord politique global entre les acteurs politiques après le folklore électoral d’après la mort d’Eyadéma, le pouvoir de Faure Gnassingbé a décidé de remettre en selle la fête de l’indépendance en diversifiant la célébration par région. Le projet fera effet de feu de paille. Une seule célébrée à Dapaong dans un grand cafouillage a résumé le projet.
Depuis, malgré la mise entre parenthèse du 13 janvier, la fête de l’indépendance a toujours souffert de difficultés à être célébrée.
Souvent, elle est émaillée de violences consécutives à la double célébration, celle du pouvoir sur les tribunes avec les défilés, et celle de l’opposition dans les rues qui soufflent les gaz lacrymogènes jetés par les forces de sécurité.
Alors que le pouvoir met ce jour sous le signe de la festivité et de la cohésion, l’opposition le met sous le signe de la contestation et des manifestations.
Les pères de l’indépendance ne se seront sans doute pas réjouis de cette cacophonie de la célébration de la fête nationale du Togo.
Trop de polémiques, trop de mésententes et de malentendus, trop de quiproquo émaillent le 27 avril au Togo.
Beaucoup se posent la question de savoir comment s’en sortir un jour.
2020, année électorale devrait profiter à une célébration spéciale de 60 ans de l’indépendance du Togo.
Alors que l’atmosphère politique est viciée par une contestation électorale mal léchée, la pandémie sanitaire s’invite.
Depuis le 2 avril 2020, l’état d’urgence a été décrété au Togo et les mesures de distanciation sont prises. Coronavirus oblige, il est quasiment impossible de se rassembler à plus de 100 personnes et de s’agglutiner. Or, une fête, surtout nationale se célèbre dans une liesse populaire ou les joies et les réjouissances se partagent et s’expriment. Les conditions de distanciation ne le permettent pas. Ne permettent au 27 avril 2020 d’avoir droit de cité.
La journée est fériée, naturellement, alors que tout le monde devrait rentrer chez lui à partir de 20 heures pour respecter le couvre-feu.
Le 27 avril 2020, fête de l’Indépendance du Togo a été encore une fois victime de modestie à ne pas se faire célébrer. Cette fois-ci sous l’effet naturel de la pandémie mondiale.
Décidément, la fête de l’indépendance du Togo n’a pas de chance et refuse de se faire plaisir.
Les autorités togolaises devraient remettre sur piédestal cette célébration qui devrait réunir et réconcilier tous les togolais.
Les états généraux de l’indépendance du Togo devraient permettre de penser la façon de célébrer la fête. Quels sont les facteurs encombrants la célébration, quels sont les pesanteurs négatives, quelles dispositions faut-il prendre pour conjurer la malchance qui empêche la célébration festive de l’indépendance du Togo.
Une évaluation impliquant, chercheurs, personnalités politiques, historiens, garants des us et coutumes, hommes et femmes épris du patriotisme qui devraient donc s’asseoir et réfléchir sur le 27 avril, la date de l’Indépendance du Togo.
Sinon, c’est une malédiction que la date de l’indépendance d’un pays, 60 ans après continue de subir le spectre de la malchance qui compromet sa célébration.
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Carlos KETOHOU