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OTR: GAPERI DANS LE GUÊPIER

Mitigé, c’est le terme qui convient le mieux à l’appréciation faite aujourd’hui de l’Office Togolais des Recettes, ce projet obsessionnel que mène actuellement le gouvernement qui s’est mis sur un chemin de non-retour. Les reformes, si elles doivent contribuer véritablement à changer les choses portent en elles, et dès leur naissance, les germes de leur réussite. Mais si elles suscitent doute et scepticisme dans les esprits des acteurs même qui doivent les piloter, plongent inévitablement dans les abîmes. Enquêtes, sondages d’opinions, recherches, comparaisons et analyses nous permettent aujourd’hui de tirer des conclusions non hâtives sur le concept de l’OTR qui a des chances égales de réussir ou d’échouer. Tout dépend des paradigmes qui lui sont assignés et les acteurs qui sont appelés à les manager. Voici l’OTR, en chair et en os.

Dans les fables de la Fontaine, Jean raconta la  ‘’fantastragique’’ histoire de l’Ours qui voulant chasser une mouche qui refusait de libérer le visage de son maître qui dormait, lui jeta à la tête un gros pavé qui tua net le pauvre vieillard, et pourtant, l’intention de l’Ours était merveilleuse, mais l’acte a été mortel. L’histoire de l’Officie Togolais des recettes risque de ressembler fort à cette fable de la fontaine si nous essayons de mettre le ministre Ayassor dans le rôle de l’ours, l’économie togolaise étant le vieillard et l’OTR le pavé, passons.

Il est vrai, les reformes, provoquent toujours et dans tous les domaines, méfiance, crainte et panique, mais la détermination avec laquelle le Togo engage les reformes économiques avec la création de l’OTR commence à faire peur et suscite des inquiétudes face aux premiers actes.

L’acte numéro un est sans doute la nomination du commissaire général. D’après un sondage réalisé  par les soins de notre rédaction sur le choix du sieur Gaperi Henri pour diriger l’OTR, sur 100 personnes interrogées dans plusieurs domaines ; cadres de l’économie, agents de douanes et des impôts, hommes politiques, diplomates, investisseurs, hommes d’affaires, journalistes, étudiants,  acteurs de la société civile des deux sexes, 64 personnes s’opposent catégoriquement à la personne de Gapéri et à sa capacité de réussir cette mission, 20 personnes lui font confiance et 16 personnes sont sans avis, s’abstiennent de porter des jugements de valeur.

Les explications recueillies par les membres du front de refus sont simples : « Monsieur Gapéri est un étranger, il ne maîtrise sans doute pas les rouages de l’économie togolaise, l’adaptation et le traitement mécanique ne peuvent pas marcher pour des régies aussi sensibles que la douane et les impôts.»

Les 20 personnes pensent qu’il aura le soutien du chef de l’Etat et du gouvernement et pourrait travailler en toute liberté. Ce soutien lui vaudra le respect et la soumission de ses collaborateurs. Pour les sans avis, c’est une aventure qui peut marcher ou pas, inutile de chercher à connaître le bout.

Mais dans la réalité de la mise en place de l’OTR est plus qu’un défi pour le ministre Adji Otheth Ayassor qui s’est déjà engagée et qui ne peut en aucun cas reculer, quelles que soient les conséquences. C’est, pour caricaturer simplement le projet, une histoire comparable à la fameuse légende de la présence du pétrole off shore aux larges des côtes togolaises soutenue et défendue mordicus par le ministre Koffi Panou à son mentor Gnassingbé Eyadéma jusqu’à sa mort. Ni l’un, ni l’autre n’avait pu tirer un litre de ce pétrole avant de s’en aller à l’au-delà. Mieux, c’est encore l’histoire de Georges W. Bush, qui étant déjà engagé dans la guerre en Irak à la recherche des armes chimiques ne pouvait plus reculer, malgré le fait qu’il s’était rendu compte que le motif des armes chimiques reproché à Saddam Hussein ne tenait guère. Voilà donc à quoi rime l’obsession du Ministre de l’économie et des finances qui a aussi des chances de réussir dans un projet qui est à lui et qu’il défend.

L’OTR en question 

L’expérience a montré que les patrons des régies financières concernées, la douane et les impôts sont souvent plus riches que les sociétés d’Etat qu’ils dirigent. C’est ainsi que depuis plus de 5 ans déjà, la gestion peu orthodoxe a laissé place à une certaine rigueur qui a permis d’améliorer les prestations de ces deux sociétés.

Pour la douane, l’arrivée avec Marc Bidamon du logiciel Sydonia ++ et les reformes informatiques et administratives engagées, poursuivies aujourd’hui ont permis de relever le niveau des recettes. De moins de 100 milliards il y a quelques années seulement, aujourd’hui la douane est à 208 milliards à la clôture du mois de novembre 2013. Cette année 2014, il est d’ores et déjà demandé à la douane de totaliser la somme de 213 milliards de FCFA.

Avec la mobilisation faite aujourd’hui par les agents de Kodjo Adédjé, on risque encore de dépasser ce seuil. Non une publicité gratuite faite à la douane, mais pour démontrer qu’il est inutile de changer d’option continuellement pour mieux faire alors que celle en cours n’est pas jugée obsolète, mais au contraire évolue en crescendo. Ce qui met encore sur le tapis, l’épineuse question de l’opportunité de l’OTR.

Pour les impôts, c’est la régie où l’on a le plus volé. A l’époque, c’était un colonel de l’armée qui ne supportait pas de quitter le bureau en laissant les gros sacs de billets de francs restés seuls. Feu le colonel de Souza, dans la complicité suspecte et goinfre de Gnassingbé Eyadéma, chef d’Etat  qui avait la banque centrale du Togo dans les locaux de Lomé II ont fait la pluie et le beau temps dans le détournement des deniers publics.

Si la rigueur factice entreprise par dame Ingrid Awadé à la tête des impôts avait été sincère, elle aurait pu sauver cette société. Son problème à elle est de déshabiller les sociétés en leur arrachant de colossales sommes d’argent pour habiller ses désirs grandiloquentes et démentes. L’objet de sa chute aujourd’hui. C’est ce qui peut faire justifier également à Ayassor la création de son office. Mais en valeur absolue,  beaucoup d’arguments militent en faveur de la crainte à nourrir vis-à-vis de cet instrument économique.

Dans l’approche de plusieurs acteurs clés dans ce projet, il s’agit d’une question de crainte à se voir infliger la foudre d’une autorité qui engage un projet sur lequel on ne semble pas se mettre en diapason.

A côté de l’ancien Ministre Dadzie qui a dénoncé systématiquement les insuffisances du concept, aucun fonctionnaire, ni des impôts, ni des douanes n’ose élever la moindre contestation. Chacun essaie de se fourvoyer, en bon togolais dans l’hypocrisie et la préservation de ses privilèges, ce qui est une faiblesse pour ce projet dont les performances sont réduites d’avance.

Mais, la détermination et l’engagement des autorités à faire passer l’instrument est sans doute un gage, quoique latent, de sa réussite, mais encore, faut-il que les acteurs maîtrisent le rôle et la responsabilité qui sont les leurs dans l’accomplissement de leurs nouvelles tâches.

Le cadran à zéro.  

Henri Gapéri est nommé pour diriger l’office togolais des recettes. A ce jour pour les autres postes à pourvoir, 81 candidatures se bousculent. Les inspecteurs de douanes et des impôts aujourd’hui en service sont plus nombreux dans les candidatures. Des anciens Directeurs généraux, des fonctionnaires internationaux veulent également contribuer à la réussite de la mission de l’OTR.

20 postes sont à pourvoir : 5 directions d’appui rattachées au commissaire général, deux services du bureau exécutif du commissaire, quatre directions rattachées au commissaire des douanes, six directions aux impôts et trois directions rattachés aux services généraux.

Dans la nomenclature des responsabilités, les postulants connaissent sans doute déjà leur travail mais ont besoin de s’approprier l’instrument, dans son fonctionnement, dans ses atouts, dans ses orientations. Seul, à ce jour, le commissaire général, le Rwandais Gapéri peut se prononcer sur le fonctionnement de l’OTR, ayant déjà dirigé dans son pays cet instrument. Cela revient à dire que même les inspecteurs  de douanes et impôts de leurs états, les futurs cadres de l’OTR devront encore se former avant que la transition ne se fasse nettement entre l’ancien dispositif et le nouveau. En ce moment, que se passerait-t-il dans l’expédition des affaires courantes hautement sensibles à la douane et aux impôts ?

Enormes difficultés que les autorités togolaises pourront juguler, non sans risque. L’adhésion au nouvel instrument de performance de l’économie est aujourd’hui assez faible, mais les promoteurs ont la responsabilité de convaincre encore bien les togolais sur les gages de sa réussite.

Il est vrai, trop facile de croire cela a réussi ailleurs et donc, pourrait réussir au Togo. Les réalités ne sont pas les mêmes, surtout lorsqu’il s’agit des Etats à tradition de bonne gouvernance comme le Rwanda et le Ghana.

Nous avons appris à travers nos enquêtes que les institutions de Bretton wood ont tiré la sonnette d’alarme sur les pièges et les risques à s’engager pour le Togo dans cette entreprise.

Mais, les gages de réussite présentés par les autorités ont permis à la banque mondiale et au FMI de rentrer dans leurs coquilles tout en espérant que les choses se passent bien. Dans le cas contraire, ces institutions rigoleront au nez des autorités togolaises pour les avoir prévenu.

Dès aujourd’hui que la machine de l’OTR est mise en marche, il est assez important que des dispositions soient prises de façon très sérieuse pour éviter chez plusieurs acteurs qui pensent qu’ils n’ont plus de chance dans la nouvelle donne de brouiller les pistes.

Les impôts et la douane sont des institutions où le terrain est plus important, même si les dispositions électroniques sont mises en jeu.

Le principe de la bonne gouvernance

L’objectif numéraire premier de la mise en place de l’officie togolais des recettes est la mobilisation par les deux régies financières mises ensemble de la somme de 400 milliards par an, ce qui était aussi possible avec l’ancien système.

Mais, une chose est de renforcer les performances pour accroitre les recettes, une autre est que ces recettes soient gérées dans la plus grande transparence. Quelle sera la responsabilité du commissaire général de l’OTR dans le suivi de la gestion des recettes qu’il aura mobilisé. C’est la question magique qui trotte dans beaucoup de méninges lorsqu’on sait que le Togo continue de végéter dans la mauvaise gouvernance. La corruption est encouragée et impunie, les marchés surtout en ce qui concerne les travaux publics sont attribués dans la plus grande opacité, bref, il y a encore du chemin à faire pour que l’OTR se stabilise en raison de l’égalité de ses chances de réussir ou non dans la manipulation de ce couteau à double tranchant. Pour l’instant, c’est Henri Gaperi qui s’installe dans ce guêpier à lourde responsabilité.

Carlos KETOHOU

Commentaires (1)
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  • Roland claver socrate

    Inquiet. Ce ptit pays est compliqué… svt ceux ki ont la bne volonté st les mm à metr les bâtons ds les roues pr une réussite idoine.

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