Union pour la République (UNIR) et l’Union des Forces de Changement (UFC) étaient les seuls partis politiques d’envergure à avoir commencé les hostilités la semaine dernière. Mais depuis samedi, la campagne électorale semble avoir pris sa véritable vitesse de croisière avec l’entrée dans la danse du Collectif Sauvons le Togo (CST) et de la Coalition Arc-en-ciel, deux regroupements de partis politiques ténors de l’opposition togolaise. De quoi agrémenter un peu plus cette phase importante du processus électoral. Mais, la question ne se situe pas là. Elle est bien plus sérieuse et va bien au-delà de la simple animation que pourra apporter l’entrée en jeu du duo CST/ARC-EN-CIEL à la campagne. Elle se pose surtout en termes d’enjeux, surtout pour le CST. Que peut gagner ou perdre le Collectif Sauvons le Togo en participant à ces législatives tant attendues ? La question est loin d’être négligeable. Analyse…
C’est bel et bien parti. La campagne, la vraie, a véritablement démarré en fin de semaine dernière avec l’entrée dans la danse des deux regroupements de partis politiques ténors de l’opposition : le CST et la Coalition Arc-en-ciel. Ainsi donc, après moult tergiversations et sans forcément avoir été satisfaits sur tous les points de leurs exigences, ils se sont quand même lancés dans la bataille.
« Nous n’avons pas voulu nous faire avoir; nous avons décidé courageusement que quel que soit ce que le pouvoir met comme entrave devant nous, nous allons à ces élections en rang de bataille comme si nous allons à un combat et nous allons gagner. Nous disons que ce pouvoir a assez fait de mal à ce pays, il faut l’arrêter et il y a deux moyens d’arrêter ce pouvoir : comme en Centrafrique, comme en Egypte ou par les urnes comme au Sénégal. Nous avons choisi pour le moment la voix démocratique à savoir de chasser ce pouvoir par les urnes et nous allons nous organiser ardemment avec toutes les forces dont nous disposons pour aller à ce combat », c’est ainsi que le CST a justifié son entrée en campagne lors d’une conférence de presse organisée jeudi dernier à Lomé.
Un autre argument qui a motivé cette décision, la libération des détenus politiques dans l’affaire des incendies notamment ceux qui figurent sur les listes du CST. Il s’agit de Gérard Adja du parti OBUTS, Jean Eklou de l’ANC et Alphonse Kpogo de l’ADDI.
Arrêtés dans le cadre des enquêtes sur les incendies des grands marchés de Lomé et Kara, les trois intéressés devraient en principe recouvrer leur liberté depuis leur libération par le doyen des juges d’instruction vendredi 5 juillet dernier. Mais ils ont été maintenus en détention et ont finalement été relâchés jeudi dernier. Cette mesure, d’après un communiqué rendu public par le Procureur de la République, « vise à permettre aux inculpés susnommés, candidats aux élections législatives du 21 juillet 2013 de battre campagne ». Ce fut donc une bonne nouvelle pour l’opposition togolaise qui, depuis des mois, réclamait la mise en liberté de ces trois personnes.
La Coalition Arc-en-ciel évoque presque les mêmes arguments pour justifier son entrée en campagne. Pour elle, les législatives du 25 juillet constituent un défi lancé par le pouvoir RPT-UNIR au peuple togolais et à l’ensemble des forces démocratiques du Togo. Ainsi, appelle-t-elle tous les Togolais à y participer et à voter pour l’opposition. Mieux, la Coalition Arc-en-ciel appelle ses militants et sympathisants à voter CST là où ses listes sont invalidées et ceux du CST à voter Arc-en-ciel là où les listes CST ont été refusées. « C’est une décision logique, naturelle, qui s’impose à nous. Nous n’avons qu’un seul adversaire, le RPT et nous considérons que les deux structures mènent la même lutte ; celle de mettre fin à ce régime qui a suffisamment fait du tort au peuple togolais », a déclaré Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson.
La bataille est bel et bien lancée. Et l’entrée en campagne des deux regroupements de partis politiques susmentionnés, surtout le CST, est la preuve qu’il n’y a plus de possibilité de retour en arrière. Le CST, c’est justement ce regroupement de partis politiques qui est le plus attendu au tournant. Vu qu’il est considéré comme le plus redoutable adversaire du parti au pouvoir et de son allié l’UFC. Mais alors, a-t-il les possibilités de battre le pouvoir au cours de ces législatives ? La question vaut son pesant d’or.
CST/Arc-en- Ciel aux législatives : Les grands enjeux du scrutin
Lancé en avril 2012, le Collectif Sauvons le Togo a sans nul doute été le regroupement de partis politiques qui a le plus donné du fil a retordre au régime de Faure Gnassingbé, du moins au cours de ces derniers mois. On se souvient encore, comme si c’était hier, de sa première grande marche, celle du 12 juin 2012, qui a drainé des centaines de milliers de Togolais dans les rues de Lomé avec au finish un sit-in à Déckon. Certaines sources avaient parlé de 600.000 personnes.
« Je sais que le divorce entre le pouvoir et les populations est profond, mais je ne savais pas que les Togolais allaient répondre aussi massivement à notre appel », s’est exclamé ce jour là, Me Atta Zeus Ajavon, le coordonnateur du mouvement. Cette mobilisation des populations avait provoqué la panique dans les rangs du pouvoir qui s’est empressé de disperser les manifestants à coups de gaz lacrymogène, mettant brusquement un terme au sit-in qu’ils prévoyaient organiser sur une période de trois jours.
Cahin-caha, le CST a fait son chemin, avec toutes les difficultés qu’on connait. Plus d’un an après sa naissance, il reste dans sa dynamique et se fixe toujours le même objectif : contribuer à bouter dehors le régime cinquantenaire des Gnassingbé qui n’a de cesse de faire du mal aux Togolais. La seule voix pour y parvenir étant les urnes, les partis politiques membres de ce regroupement ont choisi de ne pas aller aux élections de façon individuelle, mais dans le compte du Collectif, histoire de ne pas émietter les voix afin de mettre plus de chance de leur côté.
Mais, quoique salutaire, cette décision est loin d’être suffisante pour une élection qui ne sera sûrement pas du gâteau pour le CST, au vu de l’importance que lui accordent les autres formations participantes, notamment UNIR et UFC, deux partis alliés. Ceci dit, en dépit de sa popularité et de sa capacité de mobilisation, le CST doit batailler dur pour sortir la tête de l’eau. C’est dire combien de fois les enjeux sont nombreux. Appesantissons-nous un peu sur ceux du CST.
Le démarrage tardif de la campagne
La campagne électorale a officiellement commencé le 06 juillet dernier. Alors que UNIR, l’UFC et d’autres partis étaient sur le terrain, le CST, accompagné de la Coalition Arc-en-ciel, en était encore à négocier avec le pouvoir sur un certain nombre de questions concernant le scrutin. La campagne n’a véritablement commencé à son niveau qu’une semaine plus tard, le 12 juillet. Cette entrée tardive dans la campagne, de l’avis de certains observateurs de la scène politique nationale, constitue un sacré handicap pour le CST dans la mesure où ce dernier accuse une semaine de retard sur ces principaux rivaux dans la course.
Mais du côté du Collectif, on est plutôt serein et on compte sur la capacité de mobilisation de chaque parti. « Le parti au pouvoir a commencé la campagne une semaine avant nous. Mais la foule que nous avons drainée à notre passage ici, il ne l’a pas fait lorsqu’il était passé », indiquait vendredi dernier un responsable de l’ADDI (parti membre du CST) au lancement de la campagne du CST à Nano dans la région des Savanes. C’est dire combien de fois on est confiant de ce côté.
La réticence de certains militants à voir le CST aller aux élections
Une situation qui pourrait également constituer un sérieux handicap pour le CST. La méfiance de certains face au scrutin du 25 juillet. Dans l’opinion, les avis sont partagés quant à l’opportunité de voir le Collectif participer aux législatives du 25 juillet. En effet, nombreux sont les sympathisants de ce mouvement qui disent préférer le boycott pour la simple raison que l’opposition n’a pas pu obtenir toutes les garanties d’une élection libre et sans fraudes.
« Comme à chaque élection dans ce pays, je crois que les choses sont jouées d’avance. Je ne vois pas de raison de participer à cette élection alors que le découpage électoral est resté le même qu’en 2007. Autrement dit, l’opposition peut avoir plus de voix dans les urnes, mais le pouvoir aura encore la majorité au parlement. Dans ces conditions, quelle valeur peut avoir une participation à ce scrutin ? », se demande un sympathisant du CST, convaincu que les résultats seront truqués et ne refléteront pas la vérité des urnes.
Mais le boycott est-il le choix approprié ? Pas si sûr si on se réfère aux conséquences qu’a engendré le refus de l’opposition de participer aux législatives de 1999. Ce fut une aubaine pour le régime Eyadéma qui, avec sa majorité absolue au parlement, a eu les mains libres pour trucider la Constitution togolaise à volonté en 2002. Aujourd’hui encore, les Togolais en sont à subir les conséquences de ce toilettage.
La bataille avec l’’UFC
Depuis son accord dit « historique » avec le pouvoir de Lomé, l’UFC de Gilchrist Olympio s’est complètement vidée de sa substance et a perdu toute sa crédibilité devant le peuple togolais. Certes, certains responsables de ce parti continuent de croire que leur formation garde sa popularité d’antan. Mais la campagne, commencée il y a à peine deux semaines, a vite fait de les désillusionner. Il n’y a qu’à voir le peu d’intérêt que portent les populations à ce parti lors de ses caravanes et meetings pour se rendre compte du fossé gigantesque qui sépare les Togolais de l’UFC. Cependant, ce n’est pas pour autant que le CST ne doit se méfier du parti de Gilchrist Olympio. L’enterrer trop vite et minimiser sa capacité de nuisance serait commettre une erreur monumentale. Surtout que ce parti a aujourd’hui les moyens de l’Etat et s’en sert pour développer les méthodes peu orthodoxes qu’il reprochait au régime Gnassingbé Eyadéma.
En effet, en dépit de ses déboires, l’UFC a fait un travail de terrain depuis des mois. Au moment où le CST était occupé à se battre avec le gouvernement en vue de la libération de certains de ses responsables détenus dans les affaires d’incendie des marchés de Kara et Lomé, le parti de Fo Gil sillonnait certains hameaux du Togo pour non seulement parler aux populations, mais aussi les sensibiliser sur le scrutin à venir (les législatives). Ceci lui a servi de précampagne. Chose que le CST n’a pas fait. Seulement le message est-il passé, le peuple togolais n’étant pas dupe.
Par ailleurs, l’UFC a cet avantage que certains Togolais des coins les plus reculés du pays ignorent complètement que Gilchrist Olympio s’est rallié à Faure Gnassingbé. Pour eux, l’UFC demeure ce qu’elle était. C’est d’ailleurs ce qu’on essaye de leur faire croire. Or, beaucoup d’entre eux ne connaissent pas le CST ou ignorent simplement son existence. Ceci étant, n’y a-t-il pas des risques qu’ils donnent leurs voix à l’UFC vu que c’est pour ce parti qu’ils avaient l’habitude de voter auparavant parce qu’ayant rejeté le RPT ? La question en vaut la peine.
En outre, il ne faut pas exclure l’hypothèse d’une aide que pourra éventuellement apporter le parti au pouvoir à son allié l’UFC en fraudant pour elle. Le régime de Lomé à toutes les raisons de le faire. A moins de vouloir se débrouiller tout seul pour avoir la majorité absolue au cours de ces législatives. Ce qui est très peu probable. UNIR aura besoin de l’UFC dans le futur parlement pour faire passer certains lois et textes. Quoi de plus normal que d’aider le parti de Gilchrist à avoir plus de députés que le CST et l’ensemble de l’opposition traditionnelle réunie. Si et seulement si l’UFC reste dans la logique du deal conclu avec le pouvoir qui permette de maintenir Faure Gnassingbé au pouvoir. Mais encore faut-il qu’UNIR réussisse de frauder pour lui-même avant d’aider son alliée l’UFC, puisqu’il ne lui sera pas facile de poursuivre deux lièvres à la fois.
Mais tout compte fait, il appartient au CST et particulièrement à l’ANC de faire un travail de terrain très méticuleux pour non seulement avoir la population dans sa poche, mais aussi écarter les tentatives de fraudes que pourront orchestrer UNIR et l’UFC.
L’affrontement avec UNIR
Cet affrontement sera sans doute le plus difficile pour le CST, surtout quand on sait que le pouvoir n’aime rien lâcher pendant les élections et quand on connaît sa capacité de nuisance. Nuisance synonyme de fraudes bien évidemment.
Pour le compte de ces élections, le CST a les moyens de titiller sérieusement UNIR dans ses fiefs traditionnels, le nord notamment, ceci pour plusieurs raisons.
D’abord en raison du choix des candidats UNIR du nord qui, pour la plupart, sont inconnus et méconnus des populations. On suppose donc que celles-ci n’accepteraient pas confier leur destinée à des gens qu’ils ne connaissent pas, et qu’ils n’ont d’ailleurs jamais vus.
Une autre raison qui ne va pas dans l’avantage du parti au pouvoir, c’est la dissolution du RPT et la création d’UNIR. Une dissolution que beaucoup de nostalgiques de Gnassingbé Eyadéma n’ont jamais digéré. Ces élections sont peut-être pour eux l’occasion de prendre leur revanche sur Faure Gnassingbé qui s’est entêté, malgré le refus de certains, à faire disparaitre l’héritage de Gnassingbé père. Pas en votant pour l’opposition, mais en s’abstenant. Ce qui pourra éventuellement profité au CST.
Il ne faut surtout pas oublier les frustrations et séquelles laissées par la condamnation de Kpatcha Gnassingbé, les arrestations de Pascal Bodjona et de Sow Bertin Agba, tous originaires de la Kozah et plus précisément de Pya et Kouméa. Les mécontentements causés par ces affaires constituent autant d’éléments qui ne militeront pas en faveur d’UNIR. Et là aussi, ceux qui vont vouloir se venger de Faure Gnassingbé s’abstiendront d’aller voter. Ce qui pourra profiter au CST dans la partie septentrionale du pays en général. Même si sa liste a été invalidée dans la circonscription de la Kozah.
Mais tout ça reste des hypothèses, car le pouvoir n’acceptera jamais, au grand jamais, une défaite dans le grand Nord. A moins d’une grosse surprise.
En somme, UNIR risque de perdre des sièges au Nord. En revanche, elle va très sérieusement menacer le CST et l’ensemble de l’opposition dans le Yoto et le Vo comme ce fut le cas en 2007. Mieux, il peut aussi espérer gagner des sièges dans la région des Plateaux toujours comme en 2007.
Absence de listes communes CST-Arc-en-ciel
Les deux regroupements de partis politiques de l’opposition avaient prévu présenter une liste commune pour ces législatives. Seulement, ils n’y sont pas arrivés. A qui la faute ? Difficile de situer les responsabilités. Mais une chose est presque sûre. Cette absence de liste commune pourra leur porter préjudice.
Avec le mode de scrutin, si CST et Arc-en-ciel avaient fait une liste commune, ils pouvaient verrouiller les chances du parti au pouvoir d’avoir des sièges dans les fiefs traditionnels de l’opposition. Mais avec des listes différentes, ils courent le risque de voir UNIR grappiller des sièges dans leurs fiefs, alors que l’opposition n’est pas sur d’en glaner dans les fiefs du pouvoir. Mais, tout n’est pas perdu pour autant. Les deux coalitions appellent à voter pour l’autre dans les circonscriptions où elle n’est pas représentée, une vraie menace pour le pouvoir en place.
Aussi, dans le grand Lomé, UNIR a positionné des femmes en tête de liste. A l’analyse, ces femmes peuvent grappiller quelques voix vu qu’elles habitent divers quartiers de Lomé et sont d’horizon divers. Du coup, alors que Patricia-Dagban Zonvidé peut glaner un peu de voix dans le quartier Hedzranawoé et Attiégou où elle a forcément des sympathisants, Bagnah-Gamon peut en grappiller dans le quartier Adéwui, et les autres dans leurs coins respectifs. Tout cela, pendant que Jean-Pierre Fabre du CST et Dodji Apévon de la Coalition Arc-en-ciel, tous deux candidats dans le grand Lomé, vont devoir se partager les voix restantes. Voila qui prouve que s’ils avaient fait une liste commune, les choses auraient été beaucoup plus faciles. Mais péril en la demeure, la stratégie de campagne menée par UNIR n’arrange pas ces dames, aussi illustres inconnues qui ont fait leur apparition politique quelques jours avant la campagne. Elles sont absolument impopulaires et le mode de campagne dit de porte à porte ne les arrange pas du tout.
Le CST a-t-il des chances de faire mieux que l’UFC en 2007 ?
Au vu de sa capacité de mobilisation et surtout de sa composition, rien ne pourra apparemment empêcher le CST de faire le même score que l’UFC en 2007 et même de faire mieux. 27 députés et plus. Les responsables du Collectif n’en ont aucun doute. Ils sont convaincus qu’ils battront le pouvoir dans les urnes.
« Nous devons nous mobiliser pour le changement. Je sais que la détermination que nous avons ne peut aboutir qu’à la victoire », a déclaré samedi dernier Jean-Pierre Fabre, président de l’ANC, au lancement de la campagne du CST à la plage, convaincu que la victoire finale sera de leur côté.
Mais, en dépit de cette assurance, le CST a toutes les raisons de se méfier. Car, tout porte à croire que les élections de cette année seront plus fraudées que celles de 2007. Pourquoi ?
En effet, en 2007, les législatives ont été organisées alors que les massacres de 2005 étaient encore fraîches dans les esprits. C’est d’ailleurs les premières élections qui ont suivies ces événements dramatiques. Et donc tous les acteurs, y compris le pouvoir et l’ensemble de la communauté internationale de même que les partenaires en développement du Togo, voulaient œuvrer pour des élections sans violences. Mais cela n’a pas empêché les fraudes, loin de là. En plus des achats de consciences et autres stratégies, le pouvoir avaient intelligemment fraudé dans les urnes pour obtenir ses 50 députés. Ces fraudes ont été d’autant plus évidentes que tous les analystes ont estimé à l’époque que, de façon formelle, il est évident que sans fraude, il sera difficile à un parti d’avoir à lui seul plus de 40 députés. Ce que le RPT a fait en organisant des fraudes en douceur. Autrement dit, pour éviter la répétition des événements de 2005, le pouvoir a fraudé un peu la peur au ventre en 2007.
Aujourd’hui, le schéma est complètement différent. Entre temps, le chef de l’Etat, Faure Gnassingbé, s’est donné une légitimité (chose qui lui manquait en 2007) avec la présidentielle de 2010 qu’il a remporté avec plus de 61% des voix. Victoire qui reste contestée dans la rue. Ces législatives constituent donc pour lui l’occasion de confirmer cette légitimité qu’il s’est donnée pour prouver à l’opinion nationale et internationale que les contestations et manifestations de l’opposition n’ont aucunement entamé sa légitimité. Pour y parvenir, il n’aura d’autres solutions que de frauder les législatives. Voilà au moins une raison qui prouve que le scrutin du 25 juillet ne sera pas transparent.
Mais ce n’est pas fini. Il ne faut pas perdre de vue le fait que le chef de l’Etat a entre temps créé son parti, UNIR.
Un parti dans lequel, dit-on, tous les Togolais, même ceux qui n’aimaient pas le défunt RPT, se retrouvent. Une sorte de creuset national. Il faut donc, qu’à travers ces législatives, Faure Gnassingbé prouve à ses détracteurs que son nouveau parti est plus populaire que l’ancien RPT. Et ce n’est pas en ayant 50 députés ou moins qu’il le prouvera.
Le 25 juillet sera donc la voie ouverte à toute sorte de stratégies pour montrer qu’UNIR a de la popularité. La voie sera d’autant plus ouverte que l’opposition traditionnelle n’est pas présente à la CENI (Commission électorale nationale indépendante). En 2007, elle avait ses membres à la CENI, mais cela n’a pas empêché le pouvoir de frauder. Qu’en sera-t-il maintenant qu’elle y est absente ? Voilà toute la question.
Les enjeux sont donc nombreux et les défis à relever par le CST pour la victoire finale sont de taille. Ils sont de taille d’autant plus que le CST, au cours de cette campagne, devrait d’abord s’évertuer à convaincre ses militants et sympathisants du bien fondé de sa participation. Puisque pendant longtemps, les responsables de regroupement de partis politiques ont tenu un discours ambigu, et par conséquent difficile à décoder. « Nous ne boycotterons pas les urnes. Si Faure ne convoque pas le dialogue, les élections n’auront pas lieu ». Ce qui avait semé le doute dans la tête de certains.
Ensuite, il leur faut carburer dure pour empêcher le pouvoir de perpétrer ces fraudes habituelles. Et pour le faire, il leur faut mettre les moyens, financiers surtout. Des moyens qui manquent souvent à l’opposition. Manquer de vigilance, serait laisser la main libre au parti au pouvoir qui pourra se servir de cette élection pour atteindre ses objectifs.
D’ores et déjà, beaucoup de supputations se font à propos des résultats que les laborantins du régime sont déjà en train de préparer pour le compte des législatives. Ces résultats, d’après certaines indiscrétions, s’apparenteraient fortement à celui-ci : UNIR 52 députés ; UFC 21 députés ; CST 11 députés ; Arc-en-ciel 7 députés. Ce qui fait en tout les 91 députés que doit compter le futur parlement.
A l’analyse, ces résultats arrangeraient très bien le pouvoir s’ils sortaient vraiment des urnes au soir du 25 juillet 2013. Ceci, pour une raison simple. La future Assemblée nationale devant compter 91 députés, le parti qui aura la majorité absolue devrait en avoir les 4/5 c’est-à-dire 73 députés. Or, au vu de la cartographie politique actuelle du Togo, aucune formation politique, fut-elle du pouvoir, ne peut prétendre avoir la majorité absolue seul. Mais, si les résultats se présentent tels que susmentionnés, ils pourront énormément servir à UNIR. Dans la mesure où il peut se servir de son allié l’UFC pour se donner une majorité qualifiée. 52 députés de UNIR ajoutés à 21 députés de l’UFC font en tout 73 députés. Avec ce schéma, le chemin sera enfin ouvert aux deux partis qui pourront opérer toutes les réformes telles qu’ils le souhaitent et gouverner le pays à leur guise.
Mais les supputations restent les supputations et nous n’en sommes pour le moment qu’à de simples hypothèses. Rien ne prouve que ce soient ces résultats qui sortiront des urnes. Mais qu’à cela ne tienne, Jean-Pierre Fabre et les siens se veulent rassurants. Ils disent vouloir monter la garde pour empêcher toute falsification des résultats.
« Attention, il ne suffit pas seulement de se mobiliser. Nous devons être maintenant vigilants, aussi bien dans les bureaux de vote que dans les Commissions Electorales Locales Indépendantes (CELI) pour empêcher toutes les fraudes », a dit le leader de l’ANC samedi dernier à la plage de Lomé.
Et à Me Zeus Ajavon, Coordonnateur du CST, de renchérir : « Nous allons organiser la vigilance. Je sais de quoi le pouvoir est capable en fraude électorale. Nous allons tout mettre en œuvre pour que ces élections soient transparentes ».
Il ne leur reste plus qu’à prier pour que leur vigilance puisse donner les résultats escomptés.
Rodolph TOMEGAH