ROME, Italie, 20 juillet 2015/African Press Organization (APO)/ — Sans des interventions opportunes pour endiguer les foyers de grippe aviaire hautement virulente H5N1 à travers l’Afrique de l’Ouest, les craintes augmentent de voir la maladie se répandre inexorablement dans cette région et au-delà, met en garde aujourd’hui la FAO.
L’Organisation lance un appel pour 20 millions de dollars qui serviront à financer les opérations d’intervention et de prévention.
Cet appel fait suite à l’apparition de foyers du virus H5N1 dans les élevages de volailles, les marchés et les exploitations familiales au Nigéria, au Burkina Faso, au Niger, en Côte d’Ivoire et au Ghana.
Ce phénomène inquiétant survient au moment où les pays d’Afrique de l’Ouest se remettent à peine, et dans certains cas continuent de souffrir, du virus Ebola. La grippe aviaire pourrait déclencher une hécatombe de poulets – source nutritive et peu coûteuse de nourriture pour de nombreuses personnes – avec un impact néfaste sur les régimes alimentaires et l’économie de la région, aggravant ainsi une situation déjà difficile.
Des souches précédentes du virus – connues pour être très virulentes pour la volaille et capables de provoquer des maladies et des décès chez les humains – ont circulé en Asie depuis le début des années 2000 et en Egypte depuis près de 10 ans. La souche H5N1 a causé la mort de dizaines de millions de volailles et des pertes évaluées à plusieurs dizaines de milliards de dollars.
La première incursion du virus H5N1 en Afrique de l’Ouest s’est produite en 2006, mais la maladie a été éliminée en 2008. A la fin de 2014, le virus a été réintroduit au Nigéria, où il se répandit rapidement dans les trois mois qui suivirent. A ce jour, plus de 1,6 million de volailles ont été abattues ou sont mortes des suites du virus.
Vu que la maladie peut être transmise aux humains et qu’elle est considérée comme très létale, la FAO travaille en étroite collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur les évaluations de pays et les plans d’urgence tout en offrant une assistance technique et en enquêtant sur des cas de grippe potentiels et les sources de l’infection.
Les missions d’évaluation – menées en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), l’Union africaine et, dans certains cas, la Banque mondiale – au Bénin, au Cameroun, au Mali et au Togo n’ont pas identifié de cas de H5N1 chez les volailles, mais ces pays et d’autres pays de la sous-région doivent veiller à ce que les mesures de prévention et de préparation soient bien mises en place.
«Sur la base de nos connaissances, il y a un risque réel de propagation du virus. Une action urgente est nécessaire pour renforcer les systèmes d’enquête et de rapports vétérinaires dans la région et lutter contre la maladie à ses racines, avant qu’il n’y ait un débordement chez les humains», a déclaré M. Juan Lubroth, chef de la Division santé animale à la FAO.
Prévention et réponse
L’appel de la FAO pour 20 millions de dollars pour la prévention et la réponse prévoit à la fois de renforcer les systèmes vétérinaires défaillants, d’améliorer les capacités des laboratoires locaux et de dépêcher sur le terrain des experts de la FAO dans les pays touchés ou à risque.
Dans les pays qui ont connu des épizooties de grippe aviaire, les interventions comprennent la destruction des volailles infectées ou exposées au virus, la désinfection des locaux et des marchés et l’élimination sécuritaire des volailles décédées.
En attendant, les agents vétérinaires sont encouragés à utiliser les techniques de base comme le traçage en amont qui se penche sur les lieux où les animaux infectés ont été vendus ou déplacés, et le traçage en aval qui consiste à examiner les endroits où les animaux infectés ont été achetés ou les lieux d’origine. Il s’agit, en somme, de remonter aux sources du mal dans le but ultime de mettre fin aux réapparitions successives du virus et à sa propagation.
Bien que des vaccins de qualité soient disponibles, la stratégie de vaccination à mettre en œuvre pose certains défis dans quelques pays et il y a toujours le risque de créer un faux sentiment de sécurité en pensant que l’administration d’une dose de vaccin permettra d’éliminer toute menace.
Selon la FAO, les changements de comportement sont très importants, notamment l’amélioration des protocoles d’hygiène, la façon de produire de la volaille et les normes de sécurité lors du transport des animaux sains. Tout cela devrait être au cœur des plans de prévention, souligne-t-on à la FAO.
La collaboration avec le secteur privé, en particulier les coopératives de volailles et associations rurales ou de marché, est cruciale pour faire passer le message aux producteurs et aux commerçants.
Des systèmes réglementaires plus rigoureux
La production de volailles a augmenté de façon constante en Afrique de l’Ouest au cours des dix dernières années, avec certains pays, comme la Côte d’Ivoire, qui ont vu leur production grimper en flèche (plus de 60 pour cent depuis 2006).
Mais les systèmes de réglementation n’ont pas évolué pour faire face efficacement à cette augmentation de la production et il y a un besoin urgent de rendre les filières du marché plus sûres – de la production au vendeur en passant par le transporteur. Au niveau régional, la chaîne de valeur s’effectue notamment à travers les frontières, ce qui nécessite des contrôles douaniers plus stricts et une plus grande conformité avec les normes de sécurité.
Tout en collaborant avec les bureaux vétérinaires nationaux, la FAO recommande de bons plans de préparation assortis de coordination étroite avec les forces de sécurité (militaires et police), ainsi qu’avec les gouverneurs des provinces, l’OMS et les organismes régionaux comme la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), afin de mieux contrôler les foyers de grippe aviaire et prévenir leur propagation dans une région qui compte 330 millions de personnes.
«Nous sommes confrontés à une maladie – H5N1 – qui s’est déjà propagée dans cinq pays en six mois. Nous devons déployer un effort concerté pour l’arrêter net et nous devons le faire maintenant», a souligné M. Lubroth.