Le Collectif « Sauvons le Togo » ne faiblit pas dans ses activités et dans sa détermination. Le week-end dernier, certains de ses responsables ont mis le cap sur l’intérieur du pays. Trois villes à savoir Kara, Sokodé et Atakpamé. Objectif, sensibiliser les populations de ces localités sur leur plate forme revendicative et recevoir leur adhésion aux actions futures. Malheureusement des trois meetings de sensibilisation à leur agenda seuls deux ont eu lieu sans heurts : ceux d’Atakpamé et de Sokodé. Par contre celui de Kara était purement et simplement empêché par des jeunes de la localité. Mais la question que nombre d’observateurs se posent actuellement est de savoir la finalité des actions que mène le Collectif.
Le Collectif dans le cadre d’une série de manifestations au programme du Collectif et qui s’étalent sur trois semaines était à l’intérieur du pays le week-end dernier. En déplacement à Kara pour un meeting de sensibilisation, les membres du Collectif Sauvons le Togo ont été empêchés de se rendre samedi dernier sur le site dans un premier temps par les forces de l’ordre mais les leaders du CST ont brandi le document officiel autorisant la manifestation.
Suite à cela, les vicaires de Faure Gnassingbé ont jugé bon de faire intervenir un groupe de miliciens armés de gourdins et de machettes avec pour mission d’empêcher coûte que coûte le meeting du Collectif.
C’est donc sous le regard complice des forces de l’ordre que ces miliciens à la solde du régime ont chargés la délégation du CST blessant au passage un Professeur d’Université et plusieurs personnes venus assister au meeting.
Cet énième coup de force de Faure Gnassingbé a fait monter la tension d’un cran dans le pays particulièrement dans cette localité qui lui est devenue très hostile depuis l’emprisonnement de Kpatcha Gnassingbé. Il ressort de cette escalade que le CST sort vainqueur de la « bataille de Kara ». Faure Gnassingbé en effet devenu par la force des choses insensible et discrédité au Togo et dans l’opinion internationale. La pression du CST ayant fait craquer Houngbo et le Gouvernement, Faure Gnassingbé tentait désespérément de reprendre la main, en annonçant un dialogue et en évitant que les populations soient gazées lors des derniers meetings du CST à Lomé. Tous ces efforts sont aujourd’hui réduits à néant, la frustration et la détermination des populations à en découdre avec le régime ont monté d’un cran.
Ahoomey-Zunu et son gouvernement sont déjà décriés et une bonne partie de l’armée togolaise fatiguée de brutaliser les innocentes populations pour un régime qui ne leur sert que promesses et mensonges, bref Faure Gnassingbé s’est mis dans une situation de non-retour. Tout porte à croire que le régime de Faure Gnassingbé est aux abois.
A Kara, les deux terrains réservés pour le meeting ont été refusés d’accès pour, dit-on, le tournoi Maman N’Danida. C’est enfin la méthode forte qui a été utilisée. « Je ne veux voir personne ici. C’est à Lomé que vous pouvez vous livrer à ces genres de choses. On ne peut pas tolérer de casses à Kara », propos tenus par un des miliciens et rapportés par un confrère sur place. Des blessés sont signalés dont un professeur d’Université blessé à la main et à la tête et un observateur de la Ligue togolaise des droits de l’Homme, un expatrié.
Deux autres personnes seraient arrêtées et détenues par les miliciens. Par cette attitude rétrograde qui tente à soustraire la ville de Kara du territoire togolais, les responsables du pays ont confirmé la thèse du Collectif qui avait annoncé que le pouvoir réactivait ses miliciens pour empêcher leur meeting.
Face à ces débordements, les responsables du Collectif qui ont presque fait le déplacement de la ville notamment Zeus Ajavon, Raphaël Kpandé, Claude Améganvi, Agbéyomé, Francis Pedro Amuzu ont dû rebrousser chemin.sur Sokodé.
Selon plusieurs témoins, le chef de l’Etat qui séjourne à Kara aurait fait distribuer de fortes sommes vendredi nuit pour dissuader la population de la Kozah et les démobiliser. Certaines indiscrétions parlent de 120 millions de F CFA. Selon, les responsables dudit Collectif, leurs militants chargés de la préparation du meeting dans la ville de Kara ont fait l’objet de plusieurs entraves administratives.
Au total une vingtaine de meetings de sensibilisation sont prévus dans les jours à venir par le CST. Les 21, 22 et 23 août prochain, le CST retourne à Deckon, là où les manifestants avaient été réprimés violemment par les forces de l’ordre il y a environ deux mois.
Ces activités du CST permettront de jauger de la bonne foi du nouveau gouvernement dirigé par Ahoomey-Zunu et surtout avec la nomination en son sein de personnalités considérées comme des caciques du régime. Le CST réclame de meilleures conditions d’organisation des élections dans notre pays. Ces revendications sont compilées dans une plateforme dite républicaine.
Que vise le Collectif ?
De par sa composition, le CST est formé de partis politiques et d’organisations de la société civile. Il est vrai que les organisations de la société civile n’ont pas pour vocation de conquérir le pouvoir, l’exercer et en jouir comme le feraient les partis politiques.
D’ailleurs les premiers responsables du Collectif qui sont pour la plupart issus de la société civile en sont conscients et le clament haut et fort qu’ils n’ont aucune ambition du pouvoir. Mais pourquoi alors s’associer aux politiques? La raison primordiale évoquée est tout simple : lutter pour obtenir de meilleures conditions électorales et asseoir un véritable Etat de droit et de démocratie. Cet objectif est noble et très louable. C’est pourquoi ils ne ménagent aucun effort pour initier des actions impliquant le plus grand nombre possible de citoyens. Sur ce plan, ils ont raison puisque le processus de démocratisation amorcé depuis les années 90 est toujours bancal au Togo. L’Etat de droit proclamé sur les toits par les gouvernants n’est que sur papier, les faits les démentent au quotidien. Seuls les défenseurs des droits de l’homme sont à mêmes de jauger l’état d’avancement d’un pays en la matière. Leur présence au sein du Collectif est plus que nécessaire. Mais il ne serait pas surprenant qu’on puisse les retrouver aux affaires si l’opposition parvenait au pouvoir à la suite des élections transparentes et crédibles, puisqu’ils sont des citoyens togolais à part entière et ont des compétences à faire valoir certainement. Passons. Les initiateurs du Collectif Sauvons le Togo se sont inspirés du mouvement sénégalais M23 qui s’est mis à bras le corps par une détermination farouche pour tenir tête à Abdoulaye Wade. Depuis sa création, le Collectif a mené des actions pas des moindres : les prières au Bas fond du Collège St Joseph, de nombreuses conférences de presse, des meetings, la semaine contre l’impunité etc. Le point culminant de ses activités est la marche suivie de sit-in du mois de Juin qui a mobilisé plusieurs milliers de personnes à Deckon. Une mobilisation que Patrick Spirlet, ambassadeur de l’Union européenne au Togo avait qualifiée de marrée humaine. Une mobilisation historique que le Collectif devait capitaliser pour atteindre ses objectifs. Devant la peur de la mobilisation, des forces de l’ordre étaient sur les lieux pour disperser, blesser et arrêter des dizaines de manifestants. Les organisateurs même ne s’attendaient pas à une telle mobilisation. Un observateur de la scène politique togolaise avait déclaré à l’époque que le Collectif n’avait plus besoin d’interlocuteur pour déboulonner les imperturbables. Le camp d’en face a très vite compris le message et est passé par la méthode forte : celle de la répression. Comme un pèlerin infatigable, le Collectif attend une réédition dans deux semaines. Cette fois-ci, ce sont des montagnes qu’il compte déplacer. Aujourd’hui, point n’est besoin de dire que ses objectifs emballent la majorité des Togolais sauf les partisans de la politique d’autruche. A ces gens-ce s’ajoutent les cartésiens qui doutent de sa capacité à faire changer la donne politique, économique et sociale du pays. Il est vrai qu’on ne compare que deux choses comparables, (le Sénégal n’étant pas bien sûr le Togo) mais « vérité en deçà des Pyrénées » peut ne pas être « erreur au-delà ».
Jusqu’où ira donc le CST ?
Par-dessus tout, il faudrait au Collectif de ne pas être dans les Nuées. L’idéal serait d’avoir les pieds sur terre et ne pas s’adonner à l’extrémisme à outrance. La diplomatie devrait aussi être au rendez-vous. Sinon les mobilisations de rue à répétition perdront leur sens et les appels au rassemblement subiront le même sort que l’actuel pouvoir vieux de 5 décennies : l’usure et l’indifférence. L’insurrection populaire n’a pas tellement de chance au Togo car les caciques du pouvoir ne sont pas loin d’ouvrir le feu comme en 2005. Il urge de murir d’autres stratégies et de voir ce qui devrait venir après les marches et manifestations. L’alternative des marches et des meetings a depuis les années 90 connu des insuffisances. Il lui faudrait penser à de nouvelles stratégies pour valoriser les potentialités populaires qui sont à son actif. Cela pourrait le faire grandir et mettra le régime en difficultés.