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Elles étaient acerbes, les critiques émises à l’endroit de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption. L’institution mise en place pour lutter efficacement contre la corruption au Togo, ne satisfait pas les attentes de l’opinion publique qui la juge inutile et oiseuse. Pour aller au-delà d’une simple observation de l’extérieur, la rédaction de l’Indépendant Express a rencontré le président de ladite institution à son siège à Lomé. Discussions à bâtons rompus, questions-réponses, hésitations, accusations, lamentations, nous avons compris, Wiyao Essohana ne peut pas faire le miracle.
Serein et imperturbable, sûr de lui de son franc parler, totalement fondu dans les textes qui ont créés sa structure, Wiyao Essohana nous a accueilli pour la deuxième fois dans ses locaux en face du stade de Kégué. Son institution suscite beaucoup de débats. Il a des réponses à donner. Depuis sa mise en place, la HAPLUCIA essuie des critiques de tout genre de la part de l’opinion publique et même de la presse car ses résultats ne se font pas remarquer par ces dernières. Pour donc avoir l’opinion de ladite institution sur les critiques qui lui sont adressées, une équipe du journal l’Indépendant Express a rencontré le président Essohana WIYAO au siège de HAPLUCIA à Lomé-Kegue. Les échanges sont tournés autour des résultats réels obtenus par la HAPLUCIA dans sa mission.
A la question de savoir si la HAPLUCIA remplit pleinement sa mission, le président se veut rassurant. Cette rencontre fut pour lui une occasion de lever certaines équivoques quant aux prérogatives de l’institution et de préciser sa mission. Dès que la HAPLUCIA est saisie par des allégations de fraude, le président et son équipe ouvrent des enquêtes. Les résultats issus des investigations sont transmis au procureur de la république. Et c’est justement là que la mission la HAPLUCIA s’arrête.
Il revient alors au procureur de donner suite au dossier en ouvrant une procédure judiciaire contre ceux qui sont incriminés dans un dossier de corruption transmis par cette haute autorité de lutte contre la corruption. Tout se joue donc entre les mains du procureur qui jusqu’alors est resté muet face au désir des togolais de voir les acteurs de la corruption, comparaître devant la justice.
Essohana WIYAO se dédouane de façon claire, la HAPLUCIA n’a pas pour prérogative de traduire une personne en justice pour corruption. Sa mission s’arrête aux enquêtes. Déjà l’institution a transmis deux dossiers au procureur. Il s’agit du dossier de la CAN 2013 et les affaires de corruption dans la construction de la route Lomé-Vogan. D’autres dossiers sont également sur la table de HAPLUCIA. Tous les regards sont désormais tournés vers le procureur.
Contacté, le procureur admet avoir reçu les dossiers transmis par la HAPLUCIA. Il nous a confié que le parquet a à son tour ouvert des enquêtes pour confirmer les résultats des enquêtes de HAPLUCIA avant d’ouvrir une quelconque procédure judiciaire. Les dossiers étant en instruction, il n’a pas souhaité nous en dire plus. C’est là que réside alors la confusion.
Cette version du procureur remet en cause l’existence et la valeur de cette institution à qui l’autorité a confié cette mission aussi noble. Sachant que les enquêtes peuvent prendre un temps indéterminé, sinon toute une éternité au Togo, les acteurs de la corruption seraient toujours libres dans la nature sans être inquiétés. Ils pourront donc avoir le temps nécessaire pour effacer leurs traces.
Si la HAPLUCIA prend tout le temps qu’il faut pour enquêter sur une affaire et après le parquet également ouvre encore des enquêtes sur le même dossier, à quoi sert alors la présence de cette institution dénommée haute autorité de lutte contre la corruption ? L’on peut donc déduire qu’aux yeux de la justice togolaise, cette institution n’est pas crédible ou elle manque de sérieux dans son travail.
Dans la configuration actuelle où le même travail se fait deux fois, la lutte contre la corruption que les autorités togolaises clament ne serait qu’une supercherie.
La corruption fait une ascension fulgurante dans le pays. Et à cette allure où la justice traine à enclencher les procédures judiciaires tout en sachant que la corruption relève d’une affaire à caractère criminel, ce fléau a encore de beau jour au Togo.
Ce qui importe aux populations, ce sont les résultats concrets. Toutes ces enquêtes ouvertes n’existent que dans l’irréel. L’opinion publique veut voir des actes concrets. Et les actes concrets pour elle, c’est de voir les personnes qui baignent dans la corruption répondre devant la justice.
Aujourd’hui tout est entre les mains de la justice qui elle-même n’est pas épargnée par la corruption. Si vraiment les autorités togolaises veulent voir proscrire la corruption dans le pays, il est donc indispensable de donner plus de pouvoir à la HAPLUCIA et élargir ses prérogatives allant des enquêtes jusqu’à la procédure judiciaire.
Les discussions se sont poursuivies avec d’autres sujets de l’heure. L’affaire du pétrole actuellement en vogue, le dossier de la Direction des transports routiers et ferroviaires, les dossiers liés à la CEET, SIAB Bank et plusieurs autres dossiers de corruption.
Nous reviendrons sur la procédure de travail de la HAPLUCIA, les limites dans ses prérogatives, et le jeu de Ping-pong avec M. Poyodi, le Procureur de la République qui recommence le travail déjà effectué par les soins de Haplucia.
Amos DAYISSO
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