Noumènes, phénomènes ou prolégomènes, équilibres et déséquilibres, mutations et statiques, principe et raison ; concepts sans doute très académiques, mieux trop philosophiques qui ont invité dans le vif, Kant et ses maximes, Hégel et ses contradictions, Leibniz, Rousseau et consorts pour centrer le débat autour de l’existence humaine.
Le Club diplomatique de Lomé, créé il y a un mois par le Ministre des affaires étrangères Robert DUSSEY (à gauche à côté des diplomates français et de l’Union Européenne) a tenu sa session inaugurale vendredi dernier.
Promesse tenue, les invités ont eu droit à un débat bien enrichi par l’actualité mondiale et les grands défis géopolitiques et géostratégiques.
Le Ministre Robert DUSSEY, initiateur du CDL a relevé la nature du club, apolitique mais centré sur les grandes questions de l’heure débattues par d’éminentes personnalités.
«Le monde de 2015 : Entre conflits, menaces et coopérations ; entre régulations et désordres ; entre puissance et impuissance. Anatomie d’une période de transformations» : c’était le thème inscrit à l’ordre du jour de la première rencontre à Lomé. Orateur, l’ambassadeur de France au Togo, Marc Fonbaustier a développé le thème sur des angles plutôt pluri polaires : complexité de équilibres entre les grandes puissances et les moins nanties, réserves sur les politiques mondiales de croissance, de gouvernance et de décision ce qui n’est pas sans impact sur l’évolution du monde actuel: « les relations internationales en 2014 oscillent fortement entre coopérations, classiques ou renouvelées dans leurs modalités et conflits ou menaces, entre Etats et hors des Etats. D’où le sentiment, justifié, d’une sorte de «glissement » permanent, de déséquilibre croissant, d’accélération du cours de l’histoire, de surréaction, sans réelle maîtrise par quiconque. Pas de puissance dominante, pas de « règles du jeu » admises par tous, pas de prévisibilité des évènements : ce monde-là, le nôtre, produit fort logiquement un sentiment diffus d’instabilité et d’insécurité, d’autant que les nombreuses chaines d’informations continues en sont le miroir géant (le « multiplex mondial ») Les conséquences sont directes, selon le diplomate, et minent encore plus fort les puissances dites grandes qui sont frappées par plusieurs aléas endogènes qui se perpétuent : « Ce relais qui n’en est pas un, entre des Etats occidentaux affaiblis, endettés, encore perclus par la crise des « sub-primes », et des émergents relativement plus introvertis pour le moment, introduit une juxtaposition défavorable : moindre capacités des Occidentaux, qui restent tout de même très actifs sur la scène internationale; retenue des émergents »
Les relations internationales aujourd’hui, selon le diplomate français, qui a laissé son manteau d’ambassadeur pour la circonstance, sont caractérisées par la prédominance d’une minorité des Nations sur le reste. Elles jouent et distribuent les cartes et influencent fortement l’existence des autres Nations : « Sur les 197 Etats reconnus dans le monde (le dernier né étant le Soudan du Sud en 2011), on estime parfois qu’une trentaine seulement auraient les moyens d’exercer une réelle influence et que de nombreuses entités non-étatiques (multinationales ; grands établissements financiers ; acteurs transnationaux type Al Qaida etc …) sont à présent plus puissantes que les autres Etats. » Ce qui entraîne de grands défis que l’orateur a résumés en appelant a travers des axes à la refondation. Refondation des systèmes, refondation des structures mondiales, refondation des entités.
Les Nations Unies, l’Union Européenne, l’Union Africaine, ces grands ensembles mondiaux sont concernés par ce sursaut.
Une présentation universitaire qui a nourri des réflexions chez les invités à cette session inaugurale du Club diplomatique de Lomé, qui tour à tour, ont posé des problèmes sans ignorer le contexte du continent noir qui est le continent de tous les enjeux, de toutes les perspectives et de toutes les stratégies.
L’Allemagne, les Etats-Unis, la Banque Mondiale, l’Union Européenne, le PNUD n’ont pas manqué à cet agora. Intellectuels et universitaires étaient aussi présents : « l’initiative est appréciable et mérite d’être soutenue, elle mettra sans doute le Togo au centre de grands débats, la diplomatie y gagnera » a confié le diplomate congolais.
Ce n’est que le point départ d’une initiative qui va aiguiller la diplomatie togolaise à l’étranger. Un objectif du ministre Robert DUSSEY des affaires étrangères dans la création du Club diplomatique de Lomé qui se réuni dans les trois mois à venir. L’Afrique sera sans doute au cœur des prochains débats.
Carlos KETOHOU