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TOGO: Coup d’Etat au Patronat

Depuis près d’une semaine, le Conseil national du Patronat n’existe plus. Manu militari, des éléments des forces de l’ordre accompagnés des huissiers sont venus sceller les portes du siège et annoncé la nomination d’administrateurs qui devraient gérer l’association et organiser les élections dans les 18 mois à venir.
C’est la plus grosse bêtise juridique organisée par la justice togolaise déjà taxée d’indélicate malgré les milliards versés par les partenaires pour sa modernisation.
Le conseil national du Patronat est une association régie par la loi 1901 qui trouve sa légitimité dans les décisions de l’assemblée générale.
Ce qui revient à dire que pour toutes les décisions susceptibles d’être appliquées à l’association, le dernier mot revient à l’assemblée générale.
Le patronat regroupe les grandes associations de plusieurs entreprises dans plusieurs domaines. L’importation, les industries, les assurances, les travaux publics et bâtiments, etc.
Les dernières élections qui font l’objet de la dérive judiciaire sont, d’après nos informations, les plus transparentes et les plus crédibles. C’est la première fois aux élections du Patronat qu’on est passé de la main levée au vote avec urne et isoloir dirigé par une commission électorale avec un huissier pour constater la régularité.
Le scrutin a opposé le sieur Nakou, président sortant et Bruce Stéphane, présenté par le groupement des importateurs dont il n’est pas membre du bureau.
Au premier tour du scrutin, il y a eu ballotage. L’occasion a été donnée aux deux candidats de battre encore campagne pour convaincre les électeurs. Ce qui fut fait.
C’est donc au second tour que le sieur Bruce Stéphane a été battu par une voix en faveur de Nakou qui est réélu président du Patronat.
Tous les membres présents ont félicité le vainqueur du scrutin. Tous, dont le candidat malheureux, Bruce Stéphane ; qui a serré la main et fait des accolades à son adversaire avant de passer au buffet à l’hôtel Sarakawa.
La situation était calme quand trois mois après, Bruce Stéphane, en son nom personnel, sans l’accord notifié du groupement des importateurs qui l’avait proposé candidat, introduit une assignation en référé pour élections frauduleuses.
Il a raconté du n’importe quoi, pour soutenir son argumentation : Il n’aurait pas eu le temps de se préparer suffisamment, l’association des Banques, qui ne participait plus depuis deux ans au patronat n’avait pas voté et aurait voté pour lui, etc.
Mais avant cette procédure, le sieur Bruce est allé se plaindre au Premier ministre Ahoomey Zunu, demandant sa faveur de le faire insérer dans le bureau.
Ce qui était logiquement impossible. Nakou lui avait signifié devant le PM qu’on ne pourrait pas remplacer un membre élu par un individu qui a perdu en plus les élections. Plusieurs autres manœuvres n’ont pas permis au septuagénaire, de se donner une place dans le bureau élu. Ce qui l’amena à se confier aux artifices d’une justice aux pas.
Naturellement, la requête sera rejetée par le juge des référés pour vice de procédure. Bruce ne baissera pas les bras et introduit une nouvelle requête en première instance qui finira dans la surprise par lui donner raison avec des pressions et une grande campagne de corruption que nous taisons pour l’instant.
La loi n’a pas été dite. Elle a été donc escamotée au profit des maffieux.
Pire, dans sa décision de suspension de l’association, le tribunal a trouvé des moyens juridiques d’imposer une administration provisoire à la tête du patronat.
Le Patronat n’est pas une société d’Etat, n’est pas sous la tutelle d’un ministère, est régie par la loi 1901, possède des statuts qui sont réglementés par l’assemblée générale, bref, aucune disposition légale n’autorise la mise place d’un conseil d’administration provisoire.
Et comme pour couronner la forfaiture, ce sont des personnes qui traînent autant de casseroles que Bruce Stéphane qui ont été choisies. Le sieur Papaly, viré de Shell, Adjogah,et Aziabu.
Nous aurons l’occasion de revenir sur le parcours sulfureux parsemé de magouilles et de malversations de certains membres de ce conseil qui acceptent de servir la dérive judiciaire.
D’après des informations, les victimes de ce dérapage s’apprêtent à saisir le Bureau International du Travail pour faire respecter les articles 3 et 4 de la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical : « Les organisations des travailleurs et d’employeurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action. Les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à entraver l’exercice légal.» L’article 4 est plus explicite et dit que « les organisations des travailleurs et d’employeurs ne sont pas sujettes à dissolution et à suspension par voie administrative »
Ces dispositions lèvent le voile d’ores et déjà les acteurs de la forfaiture et du coup d’Etat organisé et leurs bénéficiaires.
Des problèmes sont déjà annoncés dans la foulée de la mise en place du comité provisoire d’administration.
Les membres du bureau ne seraient pas prêts à collaborer, l’administration du patronat aussi n’est pas disposée à servir les produits de la dérive judiciaire.
Un véritable problème qui plombe l’organisation patronale membre de plusieurs organisations internationales dont la FOPAO, la fédération des organisations patronales de l’Afrique de l’Ouest.
Tout ceci par l’ambition démesurée, l’arrogance et l’insatisfaction d’un homme, Bruce Stéphane.
Bruce Ahlonko Stéphane est le modèle de la gabegie, du vandalisme, de l’autocratie et de la violation des lois. C’est lui qui a usurpé du trône royal des mina dans la contestation qui l’a fait fuir son royaume. Les réunions de la chefferie se tiennent en catimini dans son bureau à Lomé.
En décidant de s’accaparer le patronat, Bruce Stéphane fait l’objet de plusieurs conflits juridiques.
En sa qualité de Chef traditionnel, la loi ne l’autorise pas à se positionner dans aucune structure. La loi relative à la chefferie traditionnelle et au statut des chefs traditionnels du Togo est claire en son article 9 : « Les fonctions de chef traditionnel sont incompatibles avec tout emploi public. Toutefois, un chef traditionnel peut être chargé d’une mission publique ponctuelle dont la durée n’excède pas un an. Les fonctions de Chef traditionnel sont incompatibles avec tout mandat électif » La loi est assez claire, mais l’homme, entouré pourtant d’éminentes personnalités ne voit pas plus loin que son égoïsme et tutoie allègrement la fonction de chefferie traditionnelle sacrée chez les peuples mina.
CCIT et CNSS aux origines

Il nous parvient de plus en plus que le désordre organisé au patronat a ses origines à deux niveaux : s’accaparer du patronat pour voir les intérêts de l’organisation bradés dans le nébuleux projet parallèle de la CNSS dénommé SEGIM et pour lequel le Président du Patronat s’oppose à la façon cavalière dont il est mené.
Le second objectif dans le coup d’État contre Nakou est de réussir à annihiler ses velléités dans la clarification des dispositions sur la limitation du mandat à la Chambre de commerce et d’Industrie du Togo. Là bas, Jonathan Fiawoo s’appuie sur l’ambiguïté des textes y référents pour chercher à rester à vie à la tête de la CCIT.
Pour ses positions radicales face à ces deux paramètres, il est l’homme à abattre et c’est Bruce Stéphane qui est mis à contribution.
Nous reviendrons sur l’homme, son licenciement d’une société pétrolière, ses pressions dans une banque pour faire virer une jeune dame qui refusait ses avances, sa responsabilité dans le disparition politique de l’opposant David Bruce, ses déboires actuelles et l’évocation abusive du nom du Chef de l’Etat pour semer la zizanie et intimider ses interlocuteurs, ses coups bas dans la chefferie traditionnelle, bref, Bruce Stéphane est à présenter, en long et en large.
Aujourd’hui, l’autorité de l’État devrait sévir, pour mettre fin à la dérive dans l’histoire du Patronat, l’image du Togo déjà entachée dans ce coup d’État risque d’isoler l’institution patronale et de porter un coup dur à l’économie togolaise.

Carlos KETOHOU

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