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S’il y a un secteur qui participe à la prospérité du pays et la résorption du chômage au Togo, c’est bien le secteur privé. Mais ce secteur semble être le parent pauvre de la législation en vigueur, entendu que les relations qu’entretiennent la Caisse nationale de sécurité sociale avec ses partenaires que sont les sociétés privées ne sont pas de nature à encourager celles-ci. Faute de répondre aux redressements et aux contrôles, les entreprises du privé sont souvent contraintes soit de mettre la clé sous le paillasson ou de faire recours à la fraude. La CNSS
Suivant la loi N° 2011-006 du 21 février 2011 portant code de sécurité sociale, les employeurs disposent de huit jours pour procéder à la déclaration des travailleurs une fois qu’ils sont embauchés. En effet, le point 1 de l’article 9 de ladite loi dit clairement « l’immatriculation du travailleur à la Caisse s’effectue obligatoirement à la diligence de l’employeur dans un délai de huit (08) jours à compter de la date de son embauche, sous peine de sanctions prévues à l’article 95 de la présente loi ». Ce qui montre clairement que tous les travailleurs devaient pouvoir bénéficier de l’application rigoureuse de cette disposition afin d’être couvert par la sécurité sociale en cas d’accidents professionnels.
Malheureusement, force est de constater que sur le terrain, la situation est tout autre et beaucoup d’emplois dans le secteur privé ne sont pas déclarés auprès de la Caisse nationale de sécurité sociale. Si certains opérateurs évoquent les difficultés financières pour se dédouaner, d’autres pointent du doigt la lenteur dans les prestations de l’Institution, surtout en cas d’accidents professionnels. Les employeurs se retrouvent encore à prendre en charge les frais d’hôpital en attendant un hypothétique remboursement qui peut prendre des mois, voire des années. Même si on note une nette amélioration des services aujourd’hui, on dit souvent que celui qui a été mordu par le serpent craint le ver de terre. C’est surtout l’obligation qui est faite à l’employeur de prendre en charge les soins avant remboursement qui irritent plus d’un, ceux-ci estimant qu’il revient à la Caisse de prendre ses responsabilités, surtout lorsqu’ils sont à jour de leurs cotisations.
Au-delà de cette situation qui n’est pas incitative pour les dirigeants d’entreprise du secteur privé, la gestion dans les retards de cotisation constitue la véritable pomme de discorde entre les deux parties. En effet, l’article 17 de la loi N° 2011-006 dit que L’employeur est tenu, primo de verser la totalité des cotisations dues, notamment la part patronale et la part ouvrière dans les délais et selon des modalités fixées par arrêté du ministre de tutelle. Secundo, une majoration de cinq pour cent (5%) est appliquée aux cotisations qui n’ont pas été acquittées à la date limite d’exigibilité des cotisations définies à l’article 12 de ladite loi. Tertio cette majoration est augmentée de un pour cent (1%) des cotisations non acquittés par mois ou fraction de mois écoulé après l’expiration de trois (03) mois à compter de la date d’exigibilité des cotisations.
En récapitulatif, lorsque vous avez des arriérés de cotisations sociales, celles-ci sont frappés de majorations, qui elles-mêmes s’élèvent de mois en mois, et de façon indéfinie, et ce, jusqu’au jour où vous avez les moyens pour payer. Et là encore, vous n’êtes pas au bout de vos peines, car lorsqu’on vous aura calculé vos arriérés, frappés de majoration, si vous ne payez pas votre dette en une seule fois, des intérêts moratoires commencent à courir et lesdits intérêts aussi augmentent de mois en mois suivant le nombre de mois choisi par vous pour payer la totalité de vos dettes.
Et pour commencer le règlement, la loi actuelle exige que vous payiez au moins le tiers de la dette avant que le reste ne soit échelonné sur 24 mois au maximum, et exceptionnellement sur 36 mois. Et pour couronner le tout, au même moment que vous payez vos arriérés, vous êtes dans l’obligation de payer les encours, c’est-à-dire les cotisations du moment. Un véritable goulot d’étranglement qui ne cesse d’asphyxier les sociétés.
A l’analyse, on a l’impression de se retrouver dans un système de vol qui ne dit pas son nom, puisque vous pouvez facilement vous retrouver avec des majorations et des intérêts moratoires, qui, cumulés, dépassent même le montant principal de vos cotisations qui n’ont pas été payées dans le temps. Alors se pose la question de savoir si nous sommes toujours dans un système de sécurité sociale ou dans un capitalisme pur et dur.
Une petite enquête auprès de employeurs fait ressortir que ce sont les difficultés financières qui sont souvent à l’origine des défauts de paiement, mais la CNSS ne fait pas toujours le pas qu’il faut vers ses partenaires pour comprendre pourquoi la situation qui prévaut et qui justifie les retards. Même si votre compte cotisant a été correct dans le passé et que vous commencez par cumuler des retards, l’action de recouvrement se résume à une mise en demeure suivie d’une contrainte pour règlement.
Même s’il est vrai que la Caisse est dans le droit de réclamer ce qui lui est dû, on peut se demander s’il n’est pas plus indiqué d’œuvrer à préserver les emplois au lieu de pousser les employeurs à bout au risque de hâter la fermeture des structures. Certains employeurs pensent même que le partenaire social qu’est la Caisse met plus de moyens à réclamer les arriérés de cotisation qu’à répondre à ses obligations liées notamment au paiement des allocations familiales et surtout à la prise en charge directe des accidents de travail.
La CNSS n’est rien sans les sociétés privées et il est important que la sécurité sociale garde son aspect social. Loin de nous l’idée de prôner le refus de paiement des obligations des employeurs, nous pensons que les deux parties doivent trouver les moyens de garder et de pérenniser leurs relations afin que les assurés que sont les travailleurs puissent bénéficier des fruits de leur assurance.
Aujourd’hui, la Caisse ne va vers les partenaires que pour faire un contrôle. Il n’y a presque jamais des actions ciblées d’information et de formation, même si nous notons l’initiation du « Vendredi de la sécu » dont la participation est fixée à deux cent mille francs par personne.
Au lieu de s’occuper de la distribution de kits scolaires – même si c’est une action louable-, puisque nous ne savons pas si cela fait partie de ses obligations, la CNSS se doit de se pencher davantage sur les doléances de ses partenaires afin de rendre plus conviviales leurs relations et préserver ainsi l’emploi des travailleurs.
Il faut nécessairement que la loi soit revue pour les arriérés de cotisations ne tuent pas les entreprises. Tout le monde peut avoir les dettes, mais le plus important, c’est de prendre des engagements pour les payer.
Et dans ce cas, il est important de bénéficier d’une oreille attentive de la part de votre créditeur. Lorsque des sociétés, auparavant sérieuses, ont des difficultés, un accompagnement s’impose afin de les aider à se relever. La loi est faite par les hommes et pour les hommes. Et elles sont faites pour les servir et non les asservir, voire les engloutir.
L’autre paire de manche dans la gestion même de CNSS fera l’objet d’un dossier pour lequel nos investigations sont en cours. LA GESTION DE LA CAISSE NATIONALE DE SECURITE SOCIALE. A quel niveau le secteur privé est impliqué et quel est son rôle ? On apprend d’ailleurs depuis quelques temps que c’est la caisse qui a lancé la construction ode l’hôpital Saint Pérégrin qui est toujours sous terre et la CNSS est grand actionnaire de la Société Nationale des Boissons SNB qui a pris forme. Quel est donc le niveau de transparence dans le financement de ces nouvelles structures, nos investigations nous en diront plus.
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Alfredo Philomena