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Corruption au Togo : HAPLUCIA, paroles, paroles…

Ce Vendredi 1er Février, la Haute Autorité de prévention et de Lutte contre la corruption et les infractions assimilées, organisait un atelier de sensibilisation à l’intention des journalistes togolais. Selon Haplucia, l’idée est de faire des journalistes des partenaires dans la lutte contre la corruption. Pourtant au cours de la journée le discours semble différent…

Créée le 28 juillet 2015 par la Loi N°2015-006, Haplucia se définit comme une institution sous aucune tutelle, autonome administrativement et financièrement. Plutôt curieux, lorsque nous savons que cette autorité fut créée par le président Faure Gnassingbé… Lorsque l’un des journalistes posera d’ailleurs la question de la sécurité envers les membres d’Haplucia, le président de l’autorité Essohanam Wiyao répondra très naturellement que l’Etat finance la sécurité des membres. Comment la haute autorité de prévention de lutte contre la corruption peut-elle être réellement indépendante lorsque celle-ci naquit avec le président même, et reçoit des aides de celui-ci ?

A l’image de cette haute autorité, le nouveau ministre de la Communication, des Sports et de la Formation civique, Foli Bazi Katari s’est contenté de rappeler que la corruption est un « cancer des économies nationales »  et que « La corruption n’épargne aucune nation même si les pays en développement sont les plus vulnérables. La création de la HAPLUCIA est l’expression de l’engagement des autorités dans la lutte contre la corruption ».

Après ce discours plein d’espoir pour la lutte, le ministre a quitté les lieux… Les questions gouvernementales, les problèmes et solutions contre la corruption n’ont donc pas été abordés avec un membre du gouvernement mais avec les journalistes, bien moins a même d’apporter des solutions. En effet c’est uniquement après son départ que Haplucia a voulu exposer selon ses responsables, les origines de la corruption, les causes et les conséquences.

Pour une autorité qui souhaitait faire des journalistes des partenaires dans les luttes, l’impression dominante était plutôt celle d’un tribunal contre le métier. En effet, la question de la corruption était fortement orientée vers des accusations envers les journalistes. Il suffit de reprendre les propos du président de l’Observatoire Togolais des Médias, OTM,  Aimé Ekpé.

Selon lui, la corruption vient en partie des journalistes qui se plaisent à menacer certains hommes politiques. L’utilisation de chantage notamment, grâce à des informations que le journaliste détient et qu’il menace de diffuser sauf rétribution pour acheter son silence. Un discours qui peut être entendu s’il prenait le temps de se positionner également de l’autre côté ; Celui des hommes politiques qui payent des journalistes afin de choisir une information à diffuser, ce qu’il n’a même pas mentionné dans son discours. Au contraire, Aimé Ekpé a préféré s’apitoyer sur le sort des hommes politiques victimes, selon lui, de « harcèlement politique ». alors que, il y a trois ans seulement, c’est le président de la HAAC qui a distribué une fameuse somme de 400 milles FCFA à des journalistes comme cadeau personnel du Chef de l’État pour les fêtes de fin d’année.

Afin de continuer dans la caricature du journaliste corrupteur, il a tenu à étayer ces propos en insistant sur le manque de déontologie de certains journalistes et de comparer le choix et la vérification  de l’information du journaliste à de la corruption même.

Selon monsieur Ekpé, si un journaliste choisit de traiter selon sa vision une information, qu’il n’est pas totalement objectif, celui-ci est certainement corrompu.

Faut-il alors rappeler à Aimé Ekpé, pourtant journaliste, que l’existence des lignes éditoriales et des divergences d’opinions ne riment forcément pas avec  la corruption.  Pour enfoncer le clou, les questions des formations de journalisme et de budget ont été mises à mal également. L’idée que les formations ne sont pas assez professionnalisantes, que le budget pour les médias au Togo est moindre que dans les autres pays.

 Il n’a bien évidemment pas besoin de vérifier la véracité des propos. Cependant, se contenter d’annoncer à des journalistes ce qu’ils savent déjà au lieu d’interroger le ministre concerné est futile.  En effet ou était le gouvernement que représente aujourd’hui le ministre Foli Bazi Katari  lorsque le budget et les formations ont été abordées… ?

Une fois les deux ou trois PowerPoint accusateurs contre les journalistes, Haplucia à ensuite pu se vanter d’un nouveau numéro vert qui sera bientôt disponible, afin de permettre à quiconque de dénoncer des corrupteurs.  La question se pose de savoir comment Haplucia va-t-elle réussir à utiliser de manière efficace les témoignages anonymes ? Comment peut-elle différencier délation et diffamation d’actes honnêtes et citoyens ? Sur la question de numéro vert, justement, c’est du déjà vu et c’est devenu finalement une mode de mettre en place un numéro vert dont le fonctionnement reste opaque. L’Office Togolais des Recettes, OTR a un numéro vert.

En aucun moment, l’on n’a présenté le rapport des dénonciations et l’exploitation qui en a été faite. De même pour l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) n’a jamais rendu publiques les dénonciations et les sanctions. Donc l’initiative de Haplucia avec l’ouverture d’un numéro vert n’est que du vent. Et que dire des multiples cas de détournements et cas de corruption dans plusieurs secteurs : travaux publics, sport, agriculture, communication etc.

Comme d’accoutumée depuis sa création en 2015, Haplucia parle beaucoup au futur mais aucune action n’a encore été concrétisée. On ne peut être étonné lorsque nous savons que c’est le président, Faure Gnassingbé peu regardant sur la corruption de son pays, qui nomme lui-même le président d’Haplucia. Et mieux lorsqu’on sait que le Président de l’Institution, le sieur Wiyao à l’ombre de la corruption pendant plusieurs années sous Gnassingbé père.

Et le fait même qu’après son départ à la retraite, il soit bombardé à la tête d’une institution fabriquée de toutes pièces alors que plusieurs jeunes cadres fléchissent sous le poids du chômage, c’est aussi une forme de la corruption. Et que dire des biens que le président a illicitement acquis comparé à son salaire, il y a de quoi réfléchir sur cette nouvelle tromperie qui ressemble fort aux précédentes qui ont brillé par l’échec et la comédie.

Comme toujours beaucoup de superflu, une lutte contre la corruption juste dans l’apparence mais aucune mesure concrète. Mais vous le savez bien, les loups ne se mangent pas entre eux…

Lorie FOURNIER.

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