Le coup de fil de Lionel Zinsou à son adversaire Patrice TALON largement vainqueur de l’élection présidentielle au Bénin est venu couronner une expérience démocratique qualifiée par les observateurs clés de la politique africaine comme une expérience au-delà des limites.
Au-delà des limites pour le fait que, beaucoup de pays dans la sous région ouest africaine et au-delà du continent continuent de s’efforcer sans succès à réussir ne serait-ce qu’une de ces étapes électorales qui permette au candidat perdant de reconnaître sa défaite et de l’exprimer à son adversaire.
Même les États dits de grandes démocraties sont admiratifs de la sagacité électorale menée de bout en bout par la république du Bénin en cette année 2016.
Une réussite qui tire ses sources dans la nature même de la pratique démocratique de ce pays à travers ses acteurs, son peuple et son histoire.
Pour les acteurs, il est beau de voir plusieurs candidats perdants qui combattaient le challenger du pouvoir importé de la France de se réunir, sans se faire prier et dans un élan naturel et logique autour de celui qui reflétait comme eux une même aspiration, celle qui consiste à rompre avec la velléité de continuité incarnée par le président sortant à travers son pion importé et la course au fauteuil présidentiel, un pion nommé Lionel Zinsou.
Pour le peuple, la maturité qui a consacré un processus électoral fondé sur la sanction par le vote et le choix par l’élection d’une orientation nationale qui était bâtie dans un véritable mouvement d’ensemble. Le peuple n’a pas hésité à dégager, par les urnes, un homme de son aspiration, obliger les autres candidats à se rassembler autour de ce choix populaire pour arriver à écarter la « mauvaise graine», qui était présentée comme une menace pour l’intégrité de la République ; Lionel ZINSOU.
Pour l’histoire, parce que de part le passé, l’histoire politique de la République du Bénin enseigne que ce peuple n’éprouve pas de difficultés à rompre radicalement avec une idéologie, une doctrine, voire une éventualité politique qui s’impose à elle. Dans l’histoire politique récente de l’Afrique, il n’y a qu’au Bénin où l’on a connu la gouvernance du pays par un consensus autour d’un triumvirat ; une exception qui permettait à trois dirigeants de gouverner le pays par consensus, sans que les et les autres se piétinent dessus ou l’un se sente dérangé par la présence de l’autre. C’est le reflet de la mobilisation autour de Patrice Talon pour déjouer le plan français de Lionel Zinsou.
C’est également dans l’histoire du Bénin où le passage de la doctrine soviétique du communisme à la doctrine démocratique n’a subi, ni le bain de sang, ni la rébellion, ni le pouvoir dynastique, mais à réussi une transition, mieux une mutation dans une délicatesse admirative qui continue de lubrifier le cheminement démocratique autour des aspirations du peuple.
Il a été une illustration parfaite de l’alternance imposée par le vote d’un peuple qui sait choisir ses dirigeants et ses intérêts et qui sait dire non à ce qu’on tente de lui imposer.
La dernière expérience démocratique Béninoise qui reste admirée à travers le monde a été le fruit de toutes ces composantes qui ont catalysé cette réussite qui devrait faire la fierté du Bénin.
La multiplicité des candidatures, le mode de scrutin, la liberté de vote, la cohésion entre les acteurs, la responsabilité des institutions concernées par le scrutin, le déroulement du vote, le comportement des candidats, l’adhésion de la masse populaire et la discipline imposée par l’atmosphère électorale aux béninois forcent l’admiration d’un peuple qui sait où se trouvent ses intérêts et où il va.
Une expérience qui élimine toutes les démocraties tropicales, pour défier celles qui sont appelées les grandes démocraties dont les processus souffrent encore des ambiguïtés procédurales et comportementales.
C’est Patrice TALON qui en sort gagnant, c’est aussi Yayi BONI, c’est encore Lionel Zinsou, mais aussi, Abdoulaye Bio TCHANE, c’est bien évidemment Sébastien AJAVON, ou encore le Général GBIAN, ce sont tous les candidats à l’élection présidentielle, ce sont donc les institutions de la république, encore aussi les médias, c’est le peuple, bref, la République du Bénin qui vient encore une fois de donner une grande leçon de démocratie à l’Afrique et au monde entier. Une belle leçon de démocratie.
C’est en définitive une expérience au-delà des limites.
Carlos KETOHOU