Posséder un chien serait propre à la culture blanche et ne serait pas africain. C’est en tous cas ce que prétend Jacob Zuma, le chef de l’État sud-africain. Débat.
Vingt ans après la fin de l’apartheid, le débat sur la culture africaine continue d’émouvoir régulièrement les Sud-Africains. Même quand il ne s’agit que d’une histoire de chiens.
Jacob Zuma, l’actuel chef de l’État, revendique sans ambiguïté ses prises de positions traditionnalistes et se pose en ardent promoteur de la culture africaine. Souvent délibérément, parfois maladroitement, mais en déclenchant toujours des débats animés chez ses concitoyens.
Dans un discours qu’il a tenu le 26 décembre à Impendle, dans sa région natale du KwaZulu Natal, Zuma s’en est pris, cette fois-ci… aux chiens. C’était le premier discours public qu’il donnait depuis sa réélection à la tête du Congrès national africain (ANC) et il s’exprimait sur la nécessité de « décoloniser les esprits ». Prenant l’exemple de la volonté de certains Noirs, dans son pays, de vouloir posséder un chien, il a estimé que ce souhait revenait à vouloir imiter les Blancs. Promener son toutou et payer pour des soins vétérinaires feraient, selon Zuma, partie de la « culture blanche ». Il a fait resurgir l’image – familière dans l’inconscient collectif des Sud-Africains – d’un homme conduisant son pick-up avec un chien assis à l’abri à ses côtés, tandis qu’un ouvrier noir frissonne dans l’hiver austral, à l’arrière du camion.
Décoloniser les esprits
Dès le lendemain, quelques journaux se sont émus de cette distinction raciale et du discrédit jeté par le président sur les propriétaires de chiens. Twitter, Facebook… les Sud-Africains se sont emparés du sujet sur les réseaux sociaux. Face à la polémique, la présidence s’est fendue d’un communiqué, expliquant que Zuma avait surtout voulu rappeler à ses concitoyens que l’amour porté aux êtres humains devait passer avant l’attention accordée à un animal de compagnie. Souvent citée comme l’une des sociétés les plus violentes au monde, l’Afrique du Sud continue de déplorer un taux de criminalité très élevé et des viols de femmes âgées ont récemment marqué les esprits, incitant les autorités à vouloir moraliser le pays.
« Le président a souligné la nécessité de préserver ce qui était bon dans certaines cultures et de ne pas adopter des pratiques qui nuisent à la construction d’une société africaine solidaire », précise Mac Maharaj, le porte-parole de la présidence dans son communiqué. « Il est malheureux que les journalistes aient choisi de rapporter les propos du président en en faisant un problème plutôt qu’en essayant de promouvoir un débat sur la décolonisation des esprits, comme un moyen de réconcilier et reconstruire la nation. »