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RDC-Kivu : des richesses minières qui entretiennent une guerre sans fin

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L’un des pays les plus instables de l’Afrique subsaharienne est sans nul doute la République Démocratique du Congo (RDC). Depuis la chute de Mobutu en 1997, cet Etat n’a presque jamais connu une paix totale, surtout dans sa partie Est, le Kivu. Près de deux décennies que sévit dans cette zone un conflit dont les effets sont de plus en plus dévastateurs. A l’origine, les richesses inestimables dont regorge cette zone devenue un véritable terrain de chasse et une zone d’instabilité chronique. Les hostilités actuelles qui se poursuivent entre le mouvement rebelle M23 et les Forces armées congolaises en sont une parfaite illustration. Retour sur un conflit interminable.

Samedi dernier, des combats ont de nouveau éclaté dans l’est de la RDC entre les rebelles du M23 et l’armée gouvernementale congolaise qui entend, malgré un appel au cessez-le-feu lancé par les insurgés, reprendre tous les territoires perdus. Appuyée par la brigade d’intervention des Nations unies, l’armée congolaise a contraint la semaine dernière les combattants du M23 à abandonner des positions qu’ils occupaient depuis plusieurs mois près de la ville de Goma. Les affrontements de samedi ont éclaté à quelques kilomètres au nord d’une localité baptisée Kibati. Pourtant, vendredi, le M23 avait annoncé qu’il suspendait immédiatement les hostilités et se retirait de la ligne de front pour permettre une enquête sur les bombardements qui ont touché Goma et en direction du territoire rwandais voisin.

Des scènes de combat à l’arme lourde, on en voit presque tout le temps dans cette partie de la RDC au potentiel énorme. Des mouvements de rebellions se succèdent à tout bout de champ et finissent par faire de cette partie du pays un véritable brasier. Massacres, viols, mutilations, non accès à l’assistance humanitaire, destruction d’écoles et d’hôpitaux, enlèvements d’enfants incorporés de force aux groupes armés, les conséquences dramatiques de ce conflit sur la population civile sont légions.  Un conflit dont l’origine est au croisement de considérations ethniques, de raisons économiques et de calculs géostratégiques impliquant d’autres pays.

Le M23 qui actuellement sévit dans la zone est accusé par des ONG de commettre de multiples exactions dans la région. De même que l’armée congolaise qui est aussi critiquée pour les violations qu’elle y commet. Mais pourquoi ce conflit s’éternise au point de donner l’impression qu’il ne finira jamais. Et pourquoi se concentre-t-il sur le Kivu ? La question vaut la peine d’être posée. Mieux, elle a certainement une réponse.

Le M23, qui sont-ils ?

Ce mouvement est composé de Congolais d’origine rwandaise et en majorité d’ethnie Tutsis. Ces Tutsis revendiquent la nationalité congolaise qu’ils obtiennent sous la présidence de Mobutu en 1972. Le M23 émane du CNDP (Congrès nationale pour la défense du peuple), un groupe armé devenu parti politique et un allié de la majorité présidentielle. Ce parti a d’ailleurs signé des accords avec Joseph Kabila le 23 mars 2009. Le chef de l’Etat congolais s’est engagé à intégrer les rebelles dans l’armée régulière, à reconnaître leur grade et à intégrer le CNDP dans le gouvernement. Mais après la dernière reconduction du mandat de Kabila, le CNDP dénonce le non-respect des accords signé. C’est de ce malentendu que naîtra le M23 (mouvement du 23 mars), une faction armée qui souhaite voir les engagements pris avec Joseph Kabila, respectés. C’est le début d’une nouvelle guerre en RDC. La première revendication du M23 est donc le respect des accords du 23 mars 2009. D’autres demandes sont venues ensuite se rajouter.

Kivu, zone de richesse

La zone instable concernée par la guerre à l’est du Congo est la région du Kivu intégrée dans la région des grands lacs. Cette zone est frontalière avec le Rwanda, le Burundi, l’Ouganda et la Tanzanie. Les combats ont lieu principalement dans le Nord du Kivu, une terre aux enjeux économiques très importants. Elle dispose de grandes ressources minières notamment l’or, la cassitérite et le pétrole. Cette région est aussi riche en gaz méthane présent naturellement dans le lac Kivu. Les richesses agricoles de cette terre fertile sont aussi très convoitées.

Le rôle du Rwanda dans cette guerre

Selon un rapport de l’ONU, le M23 est soutenu principalement par le gouvernement rwandais et plus minoritairement ougandais. Une grande partie des membres du M23 sont des Congolais d’origine rwandaise. Kigali se montre solidaire envers eux. Mais, selon les spécialistes de la région, ce n’est pas uniquement par sympathie ethnique que le Rwanda soutient cette rébellion. Kigali à de grands intérêts à maintenir une situation d’insécurité dans la zone Est du Congo. Car, mis à part la satisfaction de voir la RDC déstabilisée, le Rwanda se soucie aussi de ses intérêts économiques. L’instabilité à la frontière facilite les trafics et notamment ceux de minerais. La guerre facilite aussi le passage de toutes sortes de marchandises.

Par ailleurs, en dehors de l’ONU, des ONG comme Human Rights Watch accusent également le Rwanda de soutenir la rébellion, en lui fournissant armes, munitions et renseignements. Allégations que Kigali a toujours réfutées, alors que ceux qui pointent le régime de Kagamé du doigt affirment détenir des preuves de ce qu’ils avancent.

A qui profite le désordre ?

Les enquêtes pointent d’abord du doigt des groupes de l’armée régulière. Profitant du peu d’accessibilité qu’offrent l’est de la RDC ils se sont fixés dans les villes, les villages et les zones rurales et deviennent maîtres des lieux. Ils en profitent alors pour faire main basse sur les richesses agricoles et minières et instaurent des taxes anarchiques, des droits de passage. Ils justifient toujours leur présence par le souci de protéger les populations des rébellions. Mais en réalité, ils s’enrichissent sur le dos des habitants et n’ont pas intérêt à ce que la guerre s’arrête.

Les politiques aussi trouvent leur intérêt dans cette guerre, à en croire les enquêtes. Très souvent détachés du pouvoir central qui n’a pas toujours de contrôle stricte sur eux, les chefs de région s’accordent avec l’armée régulière, posent eux aussi leurs taxes, touchent des pourcentages sur les ressources de leur territoire. En cas d’arrêt de la guerre, ce genre de comportement ne serait plus possible.

Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, le conflit profite également très bien aux ONG qui se sont implantées depuis de très nombreuses années à Goma, la capitale du Kivu, et plus largement à l’est du pays. Elles sont financées à coût de millions de dollars. Du coup, certains de leurs responsables en ont fait leur business. Ils n’ont en réalité pas intérêt à voir les hostilités prendre fin. La fin de la guerre signifierait la fin des missions.

Et que dire des multinationales qui sont les plus concernés économiquement dans cette guerre. Les entreprises profitent en général de l’instabilité pour acheter les minerais à bas prix. Minerais qu’ils utilisent dans la fabrication de leurs téléphones par exemple. Des bénéfices tirés, les observateurs supposent qu’une partie est réinvestie dans l’armement pour soutenir l’instabilité dans la région.

Les civils, principales victimes

Cette guerre a principalement des conséquences sur les civils. Les plus visibles sont évidemment les morts dont on ne possède aujourd’hui aucun bilan. Les déplacés, eux, se comptent par centaine de milliers. On en recense 350.000 depuis le début des hostilités. Quant aux réfugiés, ils sont au nombre de13.600 réfugiés (selon les chiffres officiels) et vivent dans des conditions bien misérables. Pas d’accès à l’eau potable, à la nourriture en plus des conditions sanitaire qui sont très déplorables.

La guerre a aussi des conséquences sur l’économie locale. Le prix des denrées alimentaires augmente fortement du fait de manque de produits, mais aussi de leur taxation par l’armée régulière. Ces différents éléments exacerbent la pauvreté globale des populations.

Pour l’instant, la communauté internationale est bien silencieuse. Elle ne fait rien de significatif pour sortir l’est du Congo de cette situation. Les seules actions concrètes se limitent à l’envoi d’humanitaires (Médecins sans frontières, Croix-Rouge et autres ONG) et de casques bleus (environ 17.000) dont le mandat les limite à un rôle défensif. Même s’ils semblent avoir changé de stratégie en aidant l’armée régulière à chasser  les insurgés.

Rodolph TOMEGAH

 

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