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RCA : L’adoption de la loi sur la Cour pénale spéciale est une importante avancée vers la justice / Le gouvernement et ses partenaires doivent maintenant assurer sa mise en place rapide

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BANGUI, République Centrafricaine, 24 avril 2015/African Press Organization (APO)/ — Le Conseil national de transition (CNT) de la République centrafricaine a pris une mesure décisive en faveur de la justice pour les victimes d’atrocités en adoptant une loi créant une Cour pénale spéciale au sein du système judiciaire national, ont déclaré aujourd’hui 23 organisations de défense des droits humains centrafricaines et internationales.

Le projet de loi, qui avait été déposé au parlement de transition par le gouvernement le 6 février dernier, a été adopté le 22 avril en plénière à une très grande majorité des voix. La Cour pénale spéciale sera chargée d’enquêter sur les crimes les plus graves et de poursuivre les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis sur le territoire de la Centrafrique depuis 2003.

« En validant la création de la Cour pénale spéciale, le Conseil national de transition a dit « assez c’est assez » de l’impunité et s’est résolument positionné du côté de la justice et des victimes qui ont perdu la vie ou souffert de crimes atroces », ont déclaré les organisations de défense des droits humains. « Il n’y a maintenant aucun temps à perdre pour que le gouvernement et ses partenaires internationaux rendent la Cour pénale spéciale opérationnelle dès que possible ».

La Cour pénale spéciale telle que décrite dans la loi adoptée sera un mécanisme judiciaire hybride – c’est-à-dire composé de magistrats centrafricains et internationaux – établi au sein du système judiciaire centrafricain pour une période de 5 ans, renouvelable. Le président de la cour sera centrafricain et le procureur spécial sera international. Il y aura une majorité de magistrats nationaux.

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Les organisations signataires ont noté que les autorités centrafricaines avaient reconnu à plusieurs reprises les faiblesses du système judiciaire national. Celui-ci a été, ravagé par des années de conflit, et n’a pas toutes les ressources humaines et matérielles, ainsi que l’expertise pour gérer des enquêtes difficiles portant sur des crimes complexes. Etant donné que les enquêtes porteront sur des atrocités commises par des groupes armés encore actifs en République centrafricaine, la Cour pénale spéciale permettra également de renforcer la sécurité et la protection du personnel judiciaire et des victimes et témoins.

« Les crimes de masse sont d’une extraordinaire complexité et ne peuvent être traités comme un simple vol », ont déclaré les organisations. « La Cour pénale spéciale sera un outil adapté qui viendra renforcer le système judiciaire centrafricain pour enquêter sur ces violations graves des droits humains et assurer la sécurité des juges et des témoins ».

La loi sur la Cour pénale spéciale doit maintenant être promulguée par la cheffe de l’État de transition, Catherine Samba-Panza. Une mise en place progressive de la juridiction est prévue dans la loi, avec l’opérationnalisation immédiate de la police judiciaire, des cabinets d’instruction, et du Parquet afin que les enquêtes puissent démarrer dès que possible.

De nombreuses victimes de crimes graves commis depuis 2012 en République centrafricaine attendent que justice soit faite, ont souligné les organisations signataires. De plus, la MINUSCA, la force de maintien de la paix de l’ONU en République centrafricaine, a procédé à l’arrestation de plusieurs présumés responsables de crimes graves au cours des derniers mois, parmi lesquels trois leaders de la milice anti-balaka, et les procédures à leur encontre doivent avancer. Les organisations signataires ont ajouté que pour devenir une réalité, prête à enquêter et juger les atrocités qui continuent d’être commises dans le pays, la Cour pénale spéciale avait maintenant besoin de personnel qualifié, de financement, et de soutien politique au niveau national et international.

Le Mémorandum d’entente signé entre le gouvernement et la MINUSCA ainsi que la loi sur la Cour pénale spéciale, prévoient que la MINUSCA fournira une assistance importante à la nouvelle juridiction, notamment en termes d’appui logistique, d’enquêtes, d’arrestation, et de nomination du personnel. Le Conseil de Sécurité de l’ONU devrait favoriser le soutien financier et logistique à la Cour pénale spéciale dans le mandat de la MINUSCA, qui sera renouvelé à la fin du mois d’avril.

Il est crucial pour le succès de la cour que les experts et magistrats internationaux qui viendront appuyer le personnel national soient dotés d’une véritable expérience en matière de poursuites des crimes les plus graves et de la volonté de travailler étroitement avec leurs pairs centrafricains, ont estimé les organisations signataires.

Les organisations ont pris note du fait que la plénière du CNT avait retiré du projet de loi un article prévoyant qu’aucune immunité ne s’appliquerait devant la Cour pénale spéciale, qui était pourtant en accord avec le droit international concernant les graves crimes internationaux. Toutefois, l’article 162 du code pénal centrafricain prévoit clairement qu’aucune immunité n’est applicable pour les poursuites en matière de crimes de guerre, crimes contre l’humanité, et crimes de génocide. Les immunités ne sont pas non plus reconnues par la Cour pénale internationale. Les organisations signataires ont également noté que les procès en révision sur la base de faits nouveaux devraient être exceptionnels, soumis à des conditions strictes et relever de la compétence de la Cour pénale spéciale.

La loi sur la Cour pénale spéciale prévoit également sa coopération avec la Cour pénale internationale (CPI), qui a ouvert une seconde enquête en République centrafricaine en septembre 2014. Ce sera la première fois qu’une cour hybride est établie dans une situation où la CPI est également active.

La République centrafricaine est plongée dans une crise profonde depuis le début de l’année 2013, quand les rebelles de la coalition Séléka, majoritairement issus des provinces du Nord, se sont emparés du pouvoir à l’issue d’une campagne caractérisée par des meurtres généralisés de civils, des incendies et pillages d’habitations, et d’autres crimes graves. Vers le milieu de l’année 2013, des milices se dénommant anti-balaka se sont organisées pour combattre la Séléka, commettant des représailles à grande échelle contre les civils, en particulier musulmans, identifiés comme soutenant la Séléka. Des milliers de personnes ont été tuées et des centaines de milliers ont été déplacées par ce conflit.

« Avec un renvoi à la CPI et la création d’une cour hybride, la Centrafrique innove et démontre son engagement fort en faveur de la lutte contre l’impunité pour les crimes les plus graves », ont déclaré les organisations. « Les deux cours devront se partager le travail et élaborer les modalités de leur coopération afin de maximiser leur efficacité et multiplier les opportunités de justice ».

Organisations signataires :

Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-RCA)

Amnesty International (AI)

Association des Femmes Juristes de Centrafrique (AFJC)

Association des victimes de la LRA en RCA (AVLRAC)

Avocats Sans Frontières Centrafrique (ASF/RCA)

Bureau Information des Droits de l’Homme (BIDH)

Coalition centrafricaine pour la Cour Pénale Internationale (CCCPI)

Civisme et Démocratie (CIDEM)

Commission Episcopale Justice et Paix (CEJP)

Enfants Sans Frontières (ESF)

Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)

Femme Action et Développement en Centrafrique (FADEC)

Human Rights Watch

Initiative pour le Développement de Centrafrique (IDC)

Lead Centrafrique (Lead)

Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme (LCDH)

Mouvement des Droits de l’Homme et Action Humanitaire (MDDH)

Observatoire Centrafricain des Droits de l’Homme (OCDH)

Observatoire Centrafricain pour les Elections et La Démocratie (OCED)

Observatoire pour la Promotion de l’Etat de Droit (OPED)

Parliamentarians for Global Action (PGA)

Réseau des ONGs de Promotion et Défense des Droits de l’Homme (RONGDH)

Réseau national de la Jeunesse pour les Droits de l’Homme (RNJDH)

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